Plan de « sauvetage » ?

Avec l’austérité, le Portugal se dépeuple

Plan de « sauvetage » ?

par Serge Astoecoda

Selon un rapport de l’Institut National de Statistique (INE) diffusé ce lundi 17 juin [1], la population du Portugal poursuit sa chute. Au 31 décembre 2012, le pays comptait 10 487 289 habitants, soit 55 109 de moins que l’année précédente, ce qui correspond à une baisse de 0.52% en un an. De 1992 à 2010, la population n’avait cessé d’augmenter. En 2011, elle chutait déjà de 0.29%.

Le taux de fécondité atteint un niveau historiquement bas de 1.28 enfants par femme. L’espérance de vie continuant à augmenter, la population portugaise devient par conséquent de plus en plus vieille. Pour la première fois depuis qu’elles sont comptabilisées, les naissances sont inférieures à 90 000. Quant aux décès, ils s’élèvent en 2012 à 107 598, soit 4.6% de plus qu’en 2011.

Chaque jour, 100 personnes quittent le Portugal

Le solde migratoire est négatif depuis 2011. L’année dernière, 51 928 personnes ont quitté le Portugal et 14 606 s’y sont installées, soit un solde négatif de 37 352 habitants [2]. En moyenne, 100 personnes ont donc quitté le pays chaque jour l’année dernière.

Ces chiffres traduisent clairement l’aggravation des conditions de vie au Portugal. Depuis le début de « l’aide » de la Troïka (Commission européenne, BCE, FMI) en 2011, avec un plan de « sauvetage » de 78 milliards d’euros, le Portugal accélère le rythme des réformes visant à réduire les dépenses publiques, d’abord sous le gouvernement du socialiste José Socrates puis sous celui du centre-droit Pedro Passos Coelho : coupes de salaires dans la fonction publique, hausse des impôts (TVA, impôt sur le revenu, tabac, immobilier, automobiles), gel des pensions de retraite, diminution des remboursements de la sécurité sociale, hausses du prix des transports publics, du gaz et de l’électricité, gel et diminution des congés payés... Les mêmes recettes appliquées en Grèce avec le résultat que l’on sait.

18% de chômage

Le chômage poursuit sa hausse : près de 18% selon l’INE au 1er trimestre 2013, alors qu’il était de 14% en 2011. Bien évidemment, ces chiffres sont à relativiser et à augmenter car ils ne tiennent pas compte de tous ceux qui ne sont pas recensés comme chômeurs.

Le zèle des gouvernants portugais est tel que la Cour constitutionnelle a rejeté plusieurs mesures du budget 2013 en avril dernier. Ces derniers jours, d’autres mesures ont été annoncées, dont l’allongement du temps de travail des fonctionnaires de 35h à 40h hebdomadaires, incluant les enseignants, qui pourront également subir une « mobilité spéciale » : être licenciés.

Résultat : le 17 juin, pour le début des épreuves de fin du secondaire, les syndicats enseignants ont appelé à la grève des examens. Face à la détermination des enseignants (plus de 90% de grévistes selon les syndicats), le ministre de l’Éducation, Nuno Crato, a choisi de ne pas repousser les examens. Malgré les pressions exercées, comme la tentative d’imposition d’un service minimum invalidée, et malgré les réquisitions d’autres personnels, près de 20 000 élèves sur 90 000 devront repasser l’épreuve de portugais en juillet. Cela ne fait que commencer. Le préavis de grève court toujours.

Serge Astoecoda

Notes

[1Pour le consulter, en portugais.

[2Ce solde était déjà négatif de 24 331 habitants en moins en 2011.