RiMaflow

« Occuper, résister, produire » : le pari fou des salariés d’une usine en faillite

RiMaflow

par Collectif

Comment transformer une ancienne usine de pièces automobiles en un espace de recyclage, de conditionnement de produits alimentaires... et de culture ? C’est le pari que se sont lancés les anciens employés de l’usine Maflow, de Milan, en Italie, suite à sa fermeture, en 2012. Objectif : créer une communauté de travailleurs en autogestion, où le travail est partagé, et sans exploitation, à l’image de ce qu’ont réalisé les ouvriers argentins après la crise de 2001. Ils lancent aujourd’hui un appel à soutien pour continuer leur projet.

Nous sommes les travailleurs licenciés de Maflow, une entreprise multinationale à capitaux majoritairement italiens qui avait des usines un peu partout dans le monde. Sur le site de Trezzano sul Naviglio, à Milan, en Italie, nous étions 330 à travailler. La faillite de l’usine n’est pas le résultat de la crise industrielle mais de la spéculation : elle a été fermée en décembre 2012.

En février 2013, nous avons décidé de reprendre ce site industriel au titre des indemnités pour le travail que nous avons perdues, pour les machines qui ont été déménagées et pour les commandes qui seront désormais honorées en Pologne, et ce, même si elles sont le résultat de notre travail passé. Nous avons immédiatement créé un nouveau projet, une communauté inclusive désireuse de prendre en charge notre héritage historique : la récupération de 30 000 m² d’espace libre pour construire une « citadelle d’une autre économie » où les activités sociales et productives trouveront un point de rencontre et de soutien mutuel intégrant chômeurs et immigrants.

Quel est notre objectif ?

Durant ces 18 premiers mois, nous avons déjà beaucoup fait mais c’est désormais le moment le plus important de notre pari : nous devons relancer la production afin de nous donner de vrais salaires qui nous permettront de vivre décemment.

Nous voulons gagner ce pari ! Nous sommes déterminés à prouver qu’une usine autogérée, sans maître et sans exploitation, est possible. Mais pour ce faire, nous avons un besoin immédiat de machines pour démarrer la production. Grâce à notre travail, nous avons remis en marche le système électrique industriel. Nous avons maintenant besoin d’un système d’air comprimé qui est nécessaire pour pouvoir alimenter les machines et outils de recyclage comme les presses, tournevis, machines à enduire. Cette infrastructure est indispensable à toute activité industrielle.

Pour acheter et installer ces compresseurs, nous avons besoin d’un apport initial minimum de 15 000 euros qui rendrait notre projet possible !

Ce que nous faisons ?

À ses débuts, RiMaflow [1] a mené son projet grâce au travail d’une vingtaine d’anciens salariés et de quelques bénévoles. Ensemble, nous avons réparé la toiture et planifié les activités qui permettent à RiMaflow de vivre : un marché permanent de biens usagés, une ressourcerie de matériels électriques et électroniques, un système d’achats groupés et des activités d’autoproduction avec des produits venant du Parc agricole de Milan-sud et de SOS Rosarno (à qui nous fournissons une logistique alternative à la grande distribution), un gymnase, un auditorium, des cours, des événements culturels et des représentations, un abri pour les immigrants et les SDF. Toutes ces activités nous ont permis de couvrir les dépenses courantes d’énergie et de sécurité.

Pour permettre tout ce travail, nous avons créé l’Association « Occupy Maflow » qui coordonne toutes ces activités et une coopérative « RiMaflow, la renaissance de la Maflow » qui s’occupe des activités de réutilisation et de recyclage d’appareils électriques et électroniques.

Nous nous inspirons de l’expérience des usines récupérées d’Argentine : en 2001, ce pays était en défaut de paiement, la valeur de sa devise a chuté et des centaines de milliers de personnes se sont retrouvées sans travail et réduites à la pauvreté en l’espace d’une nuit. Dans ce pays en faillite, des travailleurs qui ont perdu leur emploi ont occupé les usines abandonnées par leurs propriétaires et ont relancé la production en autogestion. La première et la plus emblématique de ces expériences est Zanon, une usine de céramiques occupée par ses salariés. De nombreuses autres ont suivi. Inspirés par le mot d’ordre « Occuper, Résister, Produire », ces travailleurs n’ont pas seulement sauvé leur emploi mais maintenu une production et aujourd’hui, il y a plus de 300 usines récupérées en Argentine avec plus de 15 000 personnes y travaillant.

Ce texte a initialement été publié sur le site de l’association Autogestion.

Pour en savoir plus :
 Notre reportage : Dans leur usine occupée, des ouvriers aspirent à bâtir une « citadelle de l’autre économie ».
 Le site de RiMaflow.

Pour soutenir le projet :
 Le site de la collecte.

Notes

[1Pourquoi « Ri » (« Re » en français) ? C’est, expliquent les salariés, « pour toutes les belles choses qui commencent par Ri : Ri-nascita (renaissance), Ri-uso (réutilisation), Ri-fiuti (Refus), Ri-appropriazione, Ri-volta, Ri-voluzione… ». Source : Association Autogestion.