En 2013, l’équipe de Basta! s’est lancée dans une aventure inédite en créant l’Observatoire des multinationales. Notre objectif ? Mener un travail d’investigation et de veille sur les activités des multinationales, françaises principalement, et sur le rôle croissant des grandes entreprises. Cette initiative reposait à l’origine sur un constat et un pari journalistique : les pouvoirs économiques occupent une place grandissante dans le monde et dans nos vies, mais l’information indépendante sur ce pouvoir fait cruellement défaut [1].
En trois ans, l’Observatoire des multinationales s’est considérablement développé. Son site attire aujourd’hui plus de 150 000 visiteurs par mois, qui s’ajoutent aux 1,5 million de lecteurs qui retrouvent également ses enquêtes publiées sur Basta!. Plusieurs de nos informations ont été reprises dans la presse française, et parfois internationale. Nous avons noué de nombreuses collaborations avec des associations, des organisations non gouvernementales, des syndicats, des chercheurs, ainsi que d’autres médias.
Ne pas seulement refléter le point de vue lisse des directions d’entreprises
Car l’information économique ne doit pas seulement refléter le point de vue lisse des directions d’entreprises et de leurs services de communication. Nous avons ainsi relayé l’expression de travailleurs, d’associations ou de populations concernés par l’activité des multinationales françaises partout dans le monde, du Brésil à l’Australie, des États-Unis à l’Inde. Nous avons été à l’initiative, début décembre à Bruxelles, d’une rencontre rassemblant une douzaine d’organisations européennes réalisant un travail similaire sur les multinationales, comme le Transnational institute, le Corporate Europe Observatory vis-à-vis de l’Union européenne, Somo aux Pays-Bas ou encore Lobbycontrol en Allemagne.
Conditions de travail, choix énergétiques, dérèglements climatiques, modes d’alimentation, privatisations de biens communs, fiscalité, régulations, respect de la vie privée... Autant de sujets sur lesquels influent considérablement les multinationales, bien au-delà de leurs performances financières. S’inquiéter de ce pouvoir croissant, pointer leurs intenses activités de lobbying ou critiquer la passivité de nombreux politiques sont nécessaires mais pas suffisants. Il s’agit également d’analyser leurs stratégies, leurs motivations et montrer comment l’économie pourrait fonctionner autrement et mieux, sans forcément avoir pour conséquences l’intensification du travail, l’optimisation fiscale ou la dégradation rapide de l’environnement.
Face aux budgets colossaux des services com’, des moyens dérisoires
Comment ne pas laisser le champ libre au néolibéralisme ou aux nouveaux populismes xénophobes qui, malgré leur critique des « élites » et du « système », masquent mal leur connivence avec les acteurs les plus extrémistes du capitalisme financier ? Il s’agit de s’attaquer aussi bien à la violence sociale et écologique engendrée par le système économique actuel qu’à la soumission croissante de nos institutions démocratiques au droit des affaires.
Ce travail d’information indépendant est d’autant plus important que de grands groupes concentrent toujours davantage de médias entre leurs mains, en particulier en France où une dizaine de dirigeants possèdent la majorité des quotidiens et hebdomadaires d’information, ainsi que des radios et chaînes de télévisions. À quoi s’ajoutent les budgets colossaux consacrés par les grandes entreprises à leurs relations publiques ou au travail de lobbying. Comparé à cela, les moyens dont nous disposons pour faire vivre l’Observatoire des multinationales sont dérisoires. La multiplication des procès intentés par des entreprises contre des journalistes ou des ONG qui dénoncent leurs pratiques illustre aussi ce difficile rapport de force.
L’Observatoire des multinationales en 2017
Mais nous maintenons le cap. En 2017, l’Observatoire des multinationales enquêtera sur des sujets de fond qui seront au cœur des campagnes électorales à venir : l’influence que les multinationales exercent sur les démocraties, les conséquences de politiques de privatisation des services publics et leurs alternatives, le dévoiement des politiques publiques et de la diplomatie au profit des grandes entreprises.
Nous poursuivrons parallèlement notre travail d’investigation et de veille sur les activités des multinationales françaises. Pratiques fiscales, connivence avec des régimes dictatoriaux, atteintes aux droits des travailleurs dans les chaînes de sous-traitance, pollutions et destruction environnementales, grands projets inutiles, accaparement des richesses… Le travail ne manque malheureusement pas. C’est pourquoi nous avons plus que jamais besoin du soutien de nos lecteurs.
Olivier Petitjean
Comment soutenir l’Observatoire des multinationales ?
L’Observatoire des multinationales est édité par l’association Alter-médias, qui publie également le média d’information indépendant Basta! :
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