Royaume-Uni

Atos, sponsor des Jeux Paralympiques, force les handicapés à retourner au travail

Royaume-Uni

par Olivier Petitjean (Observatoire des multinationales)

Sponsor officiel des Jeux paralympiques de Londres, l’entreprise française, dirigée par Thierry Breton, mène la chasse aux handicapés bénéficiant d’une allocation et aux salariés en incapacité de travail. Le tout pour le compte du gouvernement britannique qui cherche à réduire les budgets sociaux. Les athlètes britanniques mènent la fronde, refusant d’afficher le logo d’Atos.

La multinationale française des services informatiques, dont le PDG actuel est Thierry Breton (ancien PDG de Thomson, ancien PDG de France-Télécom, ancien ministre de l’Économie et des Finances), se retrouve aujourd’hui sous le feu des critiques en Grande-Bretagne pour son rôle dans la chasse aux « faux » bénéficiaires de la sécurité sociale.

Atos, seconde firme de services informatiques en Europe et 5e au niveau mondial, est un important sponsor des Jeux Olympiques, ainsi que des Jeux Paralympiques. Mal lui a pris cette année de vouloir afficher sa présence en force aux Jeux Paralympiques de Londres. Elle s’est retrouvée la cible de manifestations de la part d’activistes handicapés et de leurs soutiens (voir les vidéos et interviews sur le site du quotidien britannique The Guardian). Les athlètes britanniques ont volontairement caché leurs accréditations lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques pour ne pas afficher le logo d’Atos.

Chasse aux handicapés allocataires

Sa filiale britannique, Atos Healthcare, est chargée d’effectuer des contrôles auprès des bénéficiaires de l’Employment and Support Allowance, destinée aux personnes en incapacité de travail. Ce contrat, passé initialement avec le gouvernement travailliste pour un projet pilote, a été étendu à l’ensemble du pays par le gouvernement conservateur. Atos Healthcare, qui s’affiche comme le premier employeur de médecins et d’infirmières au Royaume-Uni après le National Health Service, a effectué 738 000 examens de contrôle au cours de l’année 2011. Ses méthodes musclées ont été dénoncées avec vigueur par les médecins et les travailleurs sociaux. Des reportages télévisés [1] ont révélé que les évaluateurs d’Atos se voyaient fixer des objectifs préétablis de radiation, avant même d’effectuer les examens.

Pas moins de 40% de ses décisions de radiation font l’objet d’un recours (avec succès dans 38% des cas). C’est sans compter toutes les personnes vulnérables qui renoncent à faire valoir leurs droits [2]. Pourtant, le gouvernement de David Cameron semble satisfait des résultats. Il n’a pas hésité début août à conclure un nouveau contrat avec Atos, ciblant cette fois les bénéficiaires des allocations handicap – avec pour objectif prédéfini de réduire ce poste budgétaire de 20%...

Un contrat de 3,8 milliards d’euros

La politique de désinvestissement massif du gouvernement conservateur en matière d’aide sociale fait le bonheur d’une variété de firmes de conseil, d’audit et de services chargées de réaliser ces « purges ». Les contrats passés avec Atos pour contrôler – et radier – des centaines de milliers allocataires s’élèveraient ainsi à pas moins de 3 milliards de livres au total (3,8 milliards d’euros) [3], au profit de divers ministères. Le début des Jeux Olympiques avait été marqué par l’échec retentissant du dispositif de sécurité, sous-traité à une autre firme concurrente d’Atos pour les contrats gouvernementaux, G4S. L’armée avait dû être appelée à la rescousse.

La campagne contre Atos a le soutien actif de UK Uncut, le mouvement social de protestation contre la politique d’austérité et de coupes budgétaires imposée au Royaume-Uni. L’entreprise de Thierry Breton est également impliquée, en France, dans la mise en place du vote électronique pour les législatives, qui a connu les déboires que l’on sait (lire nos articles).

Olivier Petitjean

Photo : Norman Bailey/Australian Paralympic Committee