Déchets radioactifs

Le projet de « poubelle nucléaire » de Bure provisoirement gelé par la justice

Déchets radioactifs

par Sophie Chapelle

C’est une victoire pour les opposants au centre d’enfouissement de déchets radioactifs (Cigéo), situé à Bure dans la Meuse. Le 28 février, le tribunal administratif de Nancy a annulé la délibération de la commune de Mandres-en-Barrois, qui a permis à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) de devenir propriétaire d’une forêt de 220 hectares, le bois Lejuc, sous lequel doit être construit le centre d’enfouissement.

L’affaire remonte au 2 juillet 2015. Ce jour-là, le conseil municipal vote à bulletin secrets une délibération autorisant le maire à conclure avec l’Andra une convention relative à l’échange d’un bois communal contre une forêt située sur le territoire de la commune de Bonnet. Quatre habitants portent alors plainte, dans un contexte où une majorité d’habitants (50 voix sur 86) s’étaient prononcés, lors d’une consultation locale, contre cet échange de parcelles forestières. Le tribunal relève notamment que « si l’article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales autorise le vote à bulletin secret, c’est à la condition que le tiers au moins des conseillers présents le demandent ». Or, poursuivent les juges, la commune n’a pas apporté la preuve que cette demande avait été faite. En donnant raison aux plaignants, la justice gèle donc pour le moment le projet d’enfouissements de déchets nucléaires [1].

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Le tribunal administratif précise que « le vice de procédure qu’il censure est régularisable ». La commune de Mandres-en-Barrois dispose désormais de quatre mois pour adopter une nouvelle délibération approuvant l’échange de forêts. Faute de quoi il faudrait « résilier la convention conclue avec l’Andra ». Cette dernière a réagi en déclarant que cette annulation portait « uniquement sur une question de forme » et que « cela ne signifie pas pour autant le blocage du projet, et encore moins son arrêt » [2]. Le réseau Sortir du nucléaire estime au contraire que « l’Agence n’a plus aucune légitimité pour en expulser les militants et y reprendre des travaux ». Il n’est pas non plus certain que le maire de Mandres-en-Barrois obtienne de nouveau une majorité sur le projet. « Les opinions changent. Si le village au début n’était pas opposé à l’enfouissement, certains habitants reviennent sur leur position », assurent des antinucléaires [3].

Le dossier est revenu ces derniers jours dans le débat politique. Le projet de plate-forme présidentielle négocié entre Benoît Hamon (PS) et Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts) prévoit « la fin du projet d’enfouissement profond de Bure ». L’accord ajoute que « en l’état, le stockage restera en sub-surface et des études seront menées pour travailler sur d’autres options ». Philippe Poutou (NPA) et Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) sont également opposés au projet d’enfouissement des déchets à Bure.