Solidarités

À Calais, une grève de la faim pour dénoncer le traitement inhumain des exilés, 150 associations en soutien

Solidarités

par Rédaction

Un prêtre et deux militants associatifs sont en grève de la faim depuis deux semaines à Calais. Ils demandent la fin des traitements dégradants et des maltraitances infligés par l’État français et sa police aux exilés. Une pétition de soutien a été lancée.

Philippe, Anaïs et Ludovic sont en grève de la faim depuis le lundi 11 octobre à l’église Saint-Pierre de Calais, pour demander la fin des traitements inhumains et dégradants contre les personnes exilées dans cette zone frontalière.

Le père Philippe Demeestère, 72 ans, est aumônier du Secours catholique du Pas-de-Calais. Impliqué dans le tissu associatif, il accompagne et accueille les exilé.e.s de passage dans la seule permanence de jour existante dans le Calaisis qui est tenue par le Secours catholique. Anaïs Vogel et Ludovic Holbein sont des bénévoles engagés auprès des associations humanitaires et des personnes en exil sur la route de l’Angleterre. 

Les trois ont entamé leur grève de la faim après un nouveau décès d’une personne exilée dans la zone. Fin septembre, un jeune homme soudanais, Yasser, est mort en tentant de monter dans un semi-remorque au petit matin. Le vendredi 8 octobre, au moins 200 personnes lui ont rendu hommage à Calais.

« Les pratiques de la police ont rendu la vie des migrants de plus en plus misérable »

Depuis les années 1990, plus de 300 personnes exilées sont décédées à cette frontière. Face à ce constat alarmant, l’État a été interpellé mais aucune réponse satisfaisante n’a été apportée. Les trois grévistes de la faim engagés auprès des personnes exilées disent assister « quotidiennement à des formes de violences psychologiques et physiques à l’encontre des personnes exilées : expulsions toutes les 48 heures voire quotidiennes ; confiscation et destruction des effets personnels ; multiplication des arrêtés anti-distribution de nourriture et d’eau ; humiliations... »

Les militants demandent la suspension des expulsions quotidiennes et des démantèlements de campements durant la trêve hivernale, l’arrêt de la confiscation des tentes et des effets personnels des personnes exilées, un dialogue citoyen raisonné entre autorités publiques et associations non mandatées par l’État pour l’ouverture et la localisation de points de distribution de tous les biens nécessaires au maintien de la santé des personnes exilées.

Depuis plusieurs années, des ONG de défense des droits ou des associations humanitaires, des militants associatifs et des personnes exilées, et aussi régulièrement la Défenseure des droits, alertent sur les violations récurrentes des droits et les traitements inhumains à l’encontre des exilé.e.s dans le Calaisis. Ce constat a encore été documenté par un rapport de l’ONG internationale Human Rights Watch publié le 7 octobre, "Infliger la détresse. Le traitement dégradant des enfants et des adultes migrants dans le nord de la France". « Les pratiques de la police, de même que les politiques restreignant la distribution de nourriture, d’eau et d’autres produits essentiels par les associations humanitaires, ont rendu la vie des migrants de plus en plus misérable », y pointe l’ONG.

Alors que les trois militants sont en grève de la faim depuis maintenant deux semaines, 150 associations, nationales, régionales et locales, ont exprimé le 26 octobre leur soutien public aux revendications des grévistes de l’église Saint-Pierre. Le même jour, l’association Utopia 56 qui vient en aide aux exilés sur place alertait sur une nouvelle expulsion de plus de 1100 femmes, hommes et enfants présents sur le campement de Grande-Synthe. Emmanuel Macron, interpellé la veille par une journaliste lors d’un déplacement, semblait ignorer la situation.

Une pétition en ligne demande aussi l’arrêt de la maltraitance des personnes exilées. 25 000 personnes l’ont déjà signée.

Photo : © Pedro Brito Da Fonseca.