En France, 5,8 millions de salariés sont au chômage partiel pour cause d’épidémie de coronavirus, a annoncé la ministre du Travail le 7 avril [1]. L’Organisation internationale du travail a de son côté décompté que les mesures de confinement total ou partiel touchent actuellement près de 2,7 milliards de travailleurs à travers le monde, soit environ 80 % de la population active de la planète [2].
Dans le même temps, 136 millions de travailleurs de la santé et du secteur social sont sur-sollicités pour répondre à la crise sanitaire. Autant d’infirmières, médecins, travailleurs sociaux, personnels de blanchisserie et de nettoyage… qui courent un risque sérieux de contracter le Covid-19 sur leur lieu de travail. Environ 70 % des emplois dans ces secteurs sont occupés par des femmes au niveau mondial.
Certains pays comme la France, l’Allemagne, d’autres pays européens, ou encore la Nouvelle Zélande, ont pris des mesures qui protègent en partie les travailleurs qui se retrouvent sans activité, comme le chômage partiel. Ce n’est pas le cas partout. La situation est encore plus préoccupante pour les travailleurs informels, qui n’ont aucun droit. Selon l’OIT, deux milliards de personnes dans le monde travaillent dans le secteur informel, principalement dans les économies émergentes et en développement. Dans cette crise, ils sont les plus exposés au risque de se retrouver sans aucun revenu pour survivre.
Pour un fonds mondial de protection sociale universelle
« Les travailleurs de l’économie informelle ne bénéficient pas de la protection de base que les emplois formels offrent habituellement, notamment en matière de protection sociale. Ils sont également désavantagés dans l’accès aux services de soins de santé et n’ont pas de revenu de remplacement s’ils arrêtent de travailler en cas de maladie », rappelle l’OIT dans son document de suivi de la crise du Covid-19 du 7 avril. « Les travailleurs informels des zones urbaines ont également tendance à travailler dans des secteurs économiques qui non seulement présentent un risque élevé d’infection par le virus, mais sont également directement touchés par les mesures de confinement ; comme les recycleurs de déchets, les vendeurs ambulants, les travailleurs de la construction, du transport et les travailleurs domestiques », rappelle aussi l’organisation.
Parmi les pays les plus menacés, l’Inde, le Nigeria, le Brésil, où le nombre de travailleurs informels touchés par les mesures de confinement est considérable, constate l’OIT : « En Inde, environ 400 millions de travailleurs de l’économie informelle risquent de sombrer plus profondément dans la pauvreté pendant la crise ».
L’Organisation appelle donc à des mesures politiques au niveau mondial pour faire face à la crise du travail due au Covid. Pour l’OIT, il faut non seulement soutenir les entreprises, l’emploi et les revenus, mais aussi protéger les travailleurs sur le lieu de travail et utiliser le dialogue social entre le gouvernement, les travailleurs et les employeurs pour trouver des solutions à la crise. La Confédération syndicale internationale demande de son côté la création d’un fonds mondial de protection sociale universelle pour les pays les plus pauvres, afin de soutenir les soins de santé et le maintien de revenus partout sur la planète. Sharan Burrow, la présidente de la CSI, en appelle à un dialogue social au niveau mondial « entre les syndicats, les employeurs et les gouvernements » [3] : « C’est la base d’un avenir post-pandémie qui ne laisserait personne de côté ».
Photo : © Pedro Brito Da Fonseca