Il est aimé par tous les résidents de la maison de retraite dans laquelle il se forme. Lors du premier confinement, Ronaldo Mbumba s’était fait connaître sur les réseaux sociaux avec une vidéo le montrant en train de jouer sur son temps libre de la guitare pour les résidents de l’Ehpad de la Louvière, à Aurillac (Cantal), où il travaille. « Ronaldo est une personne que j’apprécie énormément, témoigne une des résidentes [1]. Il a en lui toutes les qualités nécessaires et indispensables au métier de soignant qu’il exerce auprès de nous. […] C’est impensable qu’il puisse nous quitter, il doit rester à Aurillac ! » Ronaldo est en effet sous le coup d’une menace d’expulsion vers la République démocratique du Congo, prévue le 15 mars. Le pays n’est pourtant pas considéré comme sûr par l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) qui y relève « de nombreuses entraves à la liberté de réunion, de manifester et des incidents graves contre la société civile imputables aux autorités en place ».
Le jeune homme est arrivé en 2014 en France. Seul, sans papiers, il était alors âgé de seulement 15 ans. Aujourd’hui, il arrive presque au terme de sa formation d’accompagnant éducatif et social, un métier en sous-effectif. Il travaille en parallèle comme assistant de vie dans un Ehpad à Aurillac. Le jeune homme fait l’unanimité auprès de ses collègues, de ses amis et des résidents de l’établissement. Ces derniers ont créé un collectif pour contester la décision de son expulsion. Ils ont aussi lancé une pétition en ligne qui interpelle directement le préfet du Cantal et demande la régularisation du jeune employé.
« Je ne comprends pas la décision d’expulser quelqu’un qui essaie de travailler au milieu des personnes âgées »
Le jeune homme affirme qu’il continuera de se battre, même si la date fatidique du 15 mars approche. « C’est inacceptable de partir, vu la formation que j’ai eue. À Aurillac, on est en pénurie de soignants, a dit Ronaldo Mbumba à France 3 [2]. Je ne comprends pas la décision d’expulser quelqu’un qui essaie de travailler au milieu des personnes âgées. Je me suis investi pendant le confinement, parce que j’aime faire ça. Je suis prêt à répondre aux reproches qu’on m’adresse mais je ne comprends pas l’expulsion. C’est une injustice. »
Le directeur de l’Ehpad où Ronaldo travaille, Gwendal le Berre, lui apporte également son soutien. Toutes les personnes qui l’ont suivi dès son arrivée en France — ses éducateurs, ses professeurs, les personnes qui l’ont encadré en stage — soulignent son professionnalisme.
« On les forme. Mais après, on ne leur donne pas d’autorisation de travailler »
Dans un communiqué, la préfecture du Cantal précise qu’ « à l’occasion du renouvellement du titre de séjour de Monsieur Mbumba, il lui a été demandé de présenter "les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité". » Selon la préfecture, ces documents seraient des « documents illégaux volés vierges pour une utilisation frauduleuse ». « Entendu par les agents de la Police aux frontières, Monsieur Mbumba a admis avoir obtenu son passeport sur la base de ces faux documents. Ces faits ont conduit le préfet à prendre à son encontre, le 1er juillet 2020, une obligation de quitter le territoire français », ajoute-t-elle.
Or, le jeune homme conteste l’affirmation selon laquelle il aurait obtenu son passeport grâce à de faux documents. Jean-Louis Ols, l’éducateur de Ronaldo, se désole du dysfonctionnement de l’administration : « Il est intégré. Il a pris du temps pour les autres. On a une population de jeunes comme lui qui arrivent sur le territoire. On les fait travailler, on les forme. Mais après, on ne leur donne pas d’autorisation de travailler », explique-t-il à France 3. Ronaldo Mbumba, très ému par le soutien dont il bénéficie, aspire à ce que la préfecture du Cantal revienne sur sa décision.
Thalia Creac’h
Photos : © Des papiers pour Ronaldo. En une, la photo a été prise lors d’une fête en juin 2019 à La Louvière. A la fin du dîner, Ronaldo avait chanté pour les résidents, leurs familles et ses collègues.