Climat

Énergies renouvelables : les très médiocres ambitions de Macron

Climat

par Maxime Combes

« Make our planet great again », lançait Emmanuel Macron en juin dernier face à l’annonce de Donald Trump de désengager les États-Unis de la lutte commune contre le réchauffement climatique. Les priorités de l’urgence climatique et de la transition énergétique ont été répétées par le Président français à la tribune de l’ONU en septembre. Chacun aurait donc pu s’attendre à ce que son gouvernement soit exemplaire en la matière. À la lecture d’un document de travail transmis par Paris au Conseil européen dans le cadre des discussions en cours sur les objectifs climatiques européens, il n’en est rien.

Rendu public par le site d’informations Contexte, ce document informel, daté du 12 septembre, propose un déploiement peu ambitieux des énergies renouvelables dans le mix énergétique européen. Selon le plan énergie-climat adopté en 2014, les dirigeants européens se sont engagés, d’ici à 2030, à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % (par rapport à 1990), à porter la part des énergies renouvelables à au moins 27 % de la consommation d’énergie dans l’UE, et à améliorer d’autant l’efficacité énergétique.

L’Union européenne couvre aujourd’hui 16,7 % de sa consommation finale d’énergie grâce aux énergies renouvelables – contre 8,5% en 2004 – et est censée atteindre 20 % en 2020. Il y a de très bons élèves comme la Lettonie, la Suède ou le Danemark, et de très mauvais, comme le Luxembourg, les Pays-Bas ou la Pologne, la France se situant entre les deux. Fortement critiqué pour son manque d’ambition, l’objectif pour 2030 consiste donc simplement à passer de 20% à 27% d’énergies renouvelable en dix ans. Mais la France propose de ralentir encore le rythme en parcourant à peine la moitié du chemin jusqu’en 2027, pour ne se laisser ensuite que trois ans pour réaliser la seconde moitié de l’objectif. En clair : faisons peu d’efforts aujourd’hui, nous accomplirons le plus gros du travail dans dix ans. Un délai bien trop court pour les experts, au regard du temps nécessaire pour planifier de nouveaux investissements et édifier des infrastructures.

Ci-dessus, la part des renouvelables dans la consommation d’énergie finale des 28 Etats-membres. Source : Eurostat

La France et l’UE à la remorque de la Chine sur les énergies renouvelables

Défendue lors du Conseil informel des ministres de l’énergie à Tallinn (Estonie) les 19 et 20 septembre dernier, cette proposition repousse à plus tard ce qui devrait pourtant être décidé rapidement. En matière de lutte contre les dérèglements climatiques, plus les efforts de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de développement des énergies renouvelables sont mis en œuvre rapidement, plus grande est la probabilité de rester en dessous de 2°C de réchauffement global. Le gouvernement propose donc d’institutionnaliser la procrastination tout en s’opposant à ce que la Commission européenne intervienne auprès des États-membres pour s’assurer que cet objectif européen soit bien atteint.

Extrait ci-dessus du document informel transmis par Paris au Conseil européen. Source : Contexte

En proposant une politique énergétique floue et non-contraignante, l’approche française est de nature à encourager les pays dont les mix énergétiques sont fortement carbonés à prolonger la durée de vie de leurs centrales à charbon. Si les pays qui se prétendent les plus vertueux ne sont pas ambitieux, à quoi bon l’être chez soit ? Alors que la France s’est engagée à ce que 23% de sa consommation d’énergie finale soit d’origine renouvelable en 2020 – et 32% en 2030 – cette part n’atteignait que 14,9% fin 2015.

A ces faibles ambitions, s’ajoutent des investissements en baisse dans les énergies renouvelables en 2015 et 2016. Le plan climat de Nicolas Hulot et le plan d’investissement du gouvernement vont-ils accélérer la transition vers les renouvelables ? Pas sûr, puisque le soutien à l’éolien, au solaire, à la géothermie et à la biomasse, qui s’élevait à 5,7 milliards d’euros en 2017, sont ramenés à 5,5 milliards en 2018, malgré le potentiel d’emplois que la transition énergétique constitue (lire : Ces centaines de milliers d’emplois qui n’attendent qu’une véritable volonté politique pour être créés). Le gouvernement promet cependant d’augmenter plus tard ces investissements, jusqu’à 6,5 milliards en 2020. Mais rien ne dit que cela soit suffisant pour atteindre les objectifs fixés, surtout si la part du nucléaire ne se réduit pas sensiblement.

La France donne l’impression de faire alliance avec les pires élèves de l’Union européenne qui, loin de se présenter comme les garants de l’Accord de Paris, préfèrent saboter la politique climatique européenne plutôt que lui donner plus d’ambition. Résultat : en 2016, c’est la Chine qui a installé le plus grand parc d’énergies renouvelables, loin devant les pays européens.