Europe forteresse

La sortie culturelle se termine au centre de rétention

Europe forteresse

par Julien Brygo

Ce devait être une sortie culturelle banale. La dernière de l’année, pour
une vingtaine de demandeurs d’asile de La Ruche, un service dépendant du centre public d’action sociale (CPAS) de Tournai, en Belgique. En attente du statut de réfugié politique chez nos voisins, ils se sont ainsi rendus mi-juin au célèbre marché de Wazemmes, à Lille, histoire de se changer les idées. Légaux en Belgique, ils ont pourtant été confrontés à la répression tous azimuts qui a cours en France.

Interpellés au cours d’un banal contrôle de police dans le vieux Lille, une douzaine d’entre eux se sont vus emmener de force au centre de rétention de Lesquin, où ils restèrent incarcérés plus de deux semaines, le temps que le CPAS de Tournai mobilise la cellule européenne dite « Dublin », chargée des dossiers des ressortissants non-européens étrangers, pour les libérer. Les documents provisoires émanant de l’État belge, les demandeurs d’asile sont considérés comme sans-papiers en France... « On n’a même pas pensé à ces problématiques : ils font tellement partie d’un groupe mixte avec les Belges que l’on n’y a pas vu malice », a expliqué Rita Leclercq, présidente du CPAS, à une télévision locale.

À l’heure où les politiques d’harmonisation européennes correspondent aux plans de bunkerisation souhaités par la France, cette interpellation révèle l’amalgame entre clandestins et demandeurs d’asile et illustre l’hystérique traque aux sans-papiers ordonnée par le ministre Brice Hortefeux. Cette année, il ne faudra pas attendre Noël pour que le quota de 25 000 « éloignements » soit atteint : de l’aveu même du ministre (Public Sénat, 03.12.08), en onze mois, la police a déjà reconduit « aux alentours de » 25 000 malfrats.