Est-ce un nouveau sursis pour des terres agricoles, au Nord-Est de Paris, ayant miraculeusement échappé à un demi-siècle de bétonisation ? Le 23 août, le commissaire enquêteur a rendu un avis très défavorable à la révision du plan local d’urbanisme de la ville de Gonesse, dans le Val d’Oise [1]. Parmi les points essentiels : l’urbanisation de 300 des 700 hectares du Triangle de Gonesse, et son corollaire, un méga complexe de loisirs et de commerces porté par le groupe Auchan et l’investisseur chinois Wanda (notre enquête sur ce projet).
Selon le commissaire enquêteur, les orientations du projet d’aménagement du Triangle de Gonesse sont « incompatibles avec le pilier environnemental par ses impacts sur le changement climatique, la destruction des ressources et l’atteinte à la biodiversité ». Il souligne également que « les objectifs en matière d’emploi » du projet Europacity sont « peu en phase avec le niveau de formation local ». En outre, la construction de ce complexe dans une zone déjà bien dotée en centres commerciaux risque de se traduire par des destructions d’emplois « avec potentiellement la création de friches commerciales et tertiaires ». L’avis préconise enfin de diminuer la consommation de terres agricoles.
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La municipalité socialiste dans le viseur
« Il est nécessaire d’abandonner ce projet coûteux et destructeur », a réagi le Collectif pour le triangle de Gonesse, constitué en mars 2011 en réaction à l’annonce du projet. « Ce projet est d’un autre temps. Ce qui était envisageable il y a vingt ans n’est plus acceptable aujourd’hui. Avec l’accélération du dérèglement climatique, l’aggravation des nuisances et des inégalités pour les habitants de l’Ile-de-France, il n’est plus possible de bétonner à tout-va », argumentent les opposants à Europacity.
« Les conclusions du rapport ne sont pas de nature à remettre en cause le principe de l’aménagement du Triangle de Gonesse ni à même d’entacher la détermination de la municipalité à offrir une meilleure qualité de vie aux habitants », a affirmé pour sa part la municipalité sur son site internet, dirigée par le socialiste Jean-Pierre Blazy. Le conseil municipal doit décider s’il vote la révision du PLU en l’état actuel, s’il le modifie ou s’il entreprend de le refaire entièrement. La Ville de Gonesse devrait faire connaitre sa position durant la première quinzaine de septembre.
Nicolas Hulot, allié des opposants ?
Cet avis intervient après ceux très critiques émanant de l’Autorité environnementale et défavorable de la Commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, présidée par le préfet du Val d’Oise [2]. Nicolas Hulot a déjà pris publiquement la parole contre le projet d’Immochan, lors de sa conférence de presse en juillet sur son plan climat : « Cette gourmandise que nous avons à consommer des terres agricoles et à artificialiser des sols en général est incompatible avec nos objectifs » [3]. « Nous ne gagnerons pas la bataille climatique si nous ne cessons pas d’artificialiser les sols », a également confié le ministre de l’Ecologie [4].
« Il existe un projet alternatif à la construction du centre commercial Europacity qui prévoit la valorisation des terres agricoles du Triangle de Gonesse autour d’un cycle d’économie circulaire en agro-écologie », rappellent les opposants. Porté par un regroupement de professionnels et d’associations (la Coopération pour une ambition rurale et métropolitaine agricole), ce projet alternatif « envisage la création d’emplois durables et utiles dans le domaine de la transition énergétique ainsi que la localisation dans le Nord-Est francilien d’un centre de recherches, d’innovations et de transfert de technologies sur l’agro-écologie et la sécurité alimentaire. » Sans attendre la décision des autorités, les opposants organisent le 10 septembre une « opération pousse plante » sur le triangle de Gonesse [5].
Photos : © Yann Guillotin / Collectif pour le triangle de Gonesse
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