Impacts sociaux

Le rapport d’activité qui ne plaira pas aux actionnaires de GDF Suez

Impacts sociaux

par Ivan du Roy

Un poids lourd du CAC 40 et de l’industrie énergétique tient son assemblée générale des actionnaires ce 28 avril au Palais des Congrès à Paris : GDF Suez. Des trouble-fêtes s’y sont invités pour dénoncer plusieurs projets énergétiques du groupe et leurs impacts sur le climat et les communautés locales. En cause : les barrages construits par l’entreprise française en Amazonie brésilienne et ses investissements dans le secteur du charbon, notamment en Afrique du Sud. Des militants d’Amazon Watch et des Amis de la Terre ont distribué aux actionnaires un « correctif » au rapport d’activités officiel présenté par les dirigeants de l’entreprise (accessible ici).

Un « erratum » loin de la novlangue officielle – financière – des rapports d’activité édités par les grandes entreprises. Où l’on apprend que GDF Suez ne fait pas que « réchauffer les cœurs » et « éclairer le monde », comme le prétendaient ses vœux de bonne année. « En mars 2014, un incendie se déclarait dans la mine de charbon de Morwell, en Australie. Durant trois semaines, les fumées toxiques ont exposé les riverains à une pollution élevée. Société civile et communauté scientifique s’interrogent sur la capacité de l’opérateur de la mine, GDF Suez, à maîtriser les risques », peuvent ainsi lire les actionnaires. Ou encore : « Suite à des inondations sans précédent dans le bassin du Rio Madeira, où GDF Suez construit le barrage de Jirau, un juge brésilien a ordonné à l’entreprise de refaire toutes ses études d’impact environnemental et d’indemniser les victimes » (voir notre dossier sur le sujet). Entre résultats financiers, chiffre d’affaires et montants prévisionnels de dividendes, ce genre d’information fait tâche. D’autant qu’elle ne figure bien évidemment jamais dans la documentation officielle.

Principal actionnaire : l’État français

Autre exemple : les projets de la multinationale en Afrique du Sud. Tristen Taylor, coordinateur de l’organisation sud-africaine Earthlife Africa, est venu spécialement en France pour dénoncer le projet de centrale au charbon de Thabametsi, dans le Nord du pays. Cette centrale de 1800 mégawatts (MW) alimentera en électricité les mines et les usines de raffinage de la zone. Elle sera localisée non loin de celle de Medupi (4500 MW), qui avait suscité une importante mobilisation de la société civile internationale. En plus d’engendrer d’importantes émissions de gaz à effet de serre, ces centrales auront pour effet, selon Tristen Taylor, de transformer en désert une région jusqu’alors préservée, en épuisant toutes les ressources en eau. GDF Suez et son partenaire, l’entreprise minière sud-africaine Exxaro, s’étaient dissimulés derrière une société écran – une simple boîte postale – pour solliciter les autorisations administratives [1]. Parallèlement, les leaders des deux plus importantes organisations indigènes du Brésil ont adressé une lettre ouverte aux dirigeants de l’entreprise (disponible ici). Ils demandent un moratoire sur les projets hydroélectriques de GDF Suez en Amazonie et l’engagement d’un dialogue sincère et transparent avec les peuples autochtones avant tout nouveau projet.

L’erratum au rapport remis aux actionnaires pointe aussi « le lobbying contre le climat » auquel participe GDF Suez. Objectif : que l’Union européenne soit moins ambitieuse en matière de réduction de ses émissions de CO2. Rappelons que l’État français est un actionnaire de référence de l’opérateur gazier, détenant 36% des actions. Qu’en dit Arnaud Montebourg ?

Notes

[1Sur ce projet de centrale, lire aussi cet article de Mediapart.