Les secrets de la carte interdite

OGM

La guerre de l’information fait rage autour des cultures transgéniques. D’un côté, les militants anti-OGM souhaitent informer le public grâce à une carte des parcelles génétiquement modifiées. De l’autre, exploitants et multinationales bio-tech cultivent le secret, avec la complicité de l’Etat.

Fidèle à sa tradition de cultiver le secret, le gouvernement français refuse de donner la localisation des essais et des organismes génétiquement modifiés en plein champ. C’est une pratique non conforme à la directive européenne 2001/18 qui impose aux Etats membres la publication de registres publics destinés à informer les citoyens sur les emplacements de cultures d’organismes génétiquement modifiés (OGM) en plein champ. La France n’a toujours pas transposé cette directive, un retard qui lui vaut des rappels à l’ordre de la part de la Commission européenne. Greenpeace a pris les devants en publiant une carte, fin juin, où figure la localisation des champs connus de cultures trans-géniques. Cette carte est établie grâce à des « détectives de champs » qui se réfèrent aux documents officiels. Les agriculteurs installés près des cultures trans-géniques peuvent ainsi être alertés et essayer de se protéger d’éventuelles contaminations.

Mais les autorités judiciaires ne l’ont pas entendu de cette oreille. Deux propriétaires de champs de maïs transgénique commercial ont porté plainte contre Greenpeace pour cette publication et obtenu gain de cause : l’organisation écologiste a été obligée de retirer la carte de son site, selon le verdict rendu le 26 juillet par le Tribunal de grande instance de Paris. Plusieurs organisations ont cependant repris la carte, notamment la Confédération paysanne Confédération paysanne et le WWF France.

La carte fonctionne avec des liens. Ainsi par exemple, un clic sur le champ expérimental près de la ville de Tours (Indre-et-Loire) donne ces informations : « Localisation de la parcelle : Nouzilly (37). Coordonné GPS 47°32’37.04 Nord/0°44’35.78 Est. Superficie : 2500 mètres carrés. Variété : maïs ». Autre exemple : la parcelle près de la commune de Grézet-Cavagnan (Lot-et-Garonne), une culture commerciale au nord-ouest de Toulouse sur la carte. Greenpeace a marqué cette parcelle, notifiée par l’entreprise multinationale Monsanto, d’une immense croix et en a tiré des images. Coïncidence ? Ce champs, qui appartient à l’un des exploitants ayant porté plainte contre l’organisation écologiste, a été fauché le 2 septembre par 250 militants de la Confédération paysanne, dont José Bové. D’après Greenpeace, « plusieurs milliers d’hectares de maïs OGM sont cultivés en France à des fins commerciales, dans le secret et sans aucun contrôle de l’Etat ».

Henrik Lindell