Mouvement social

Grâce aux grévistes de la CGT, des usagers paient l’électricité moins cher

Mouvement social

par Sophie Chapelle

« A cette heure, ce sont plus de 1 100 000 abonnés en région parisienne qui ont été basculés en heures creuses. » C’est le bilan tiré à 9h30 le 2 juin par la Fédération nationale des mines-énergies de la CGT (FNME). La veille au soir, la CGT Mines-énergie avait mis en place un piquet de grève national reconductible dans toutes les centrales. « Les salariés mènent une grosse opération en région parisienne de passage en heures creuses, avec la volonté d’alléger la facture des abonnés », confirme Marie-Claire Cailletaud, porte-parole FNME CGT jointe par Basta! [1]. Des passages en heures creuses ont aussi été effectués à Lorient, la Hague, le Val de Saône, le Contentin, Châlon-sur-Saône... [2] Les usagers concernés paient entre 2 et 40 centimes de moins par kWh. « Ces derniers mois, nous avons aussi mené des actions de rétablissement de courant chez des clients démunis faisant l’objet de coupures pour impayés », précise t-elle.

Le 28 mai au matin, 300 000 personnes autour de la Courneuve ont ainsi bénéficié du passage en heures creuses, suite à une action de la CGT Energie de Seine-Saint-Denis et des Robins des bois de l’énergie [3]. « Les salariés qui ont agi viennent de ces endroits-là et connaissent les conditions de vie de ces populations. Ce sont des actions qui les rendent fières, observe Marie-Claire Cailletaud. Si ce type d’actions existe depuis 2004, elles demeurent en général peu médiatisées. Objectif : « Que notre mouvement reste populaire. Nous sommes aussi très attachés à notre mission de service public. »

François Hollande et Pierre Gattaz visés par les coupures

Parallèlement à ces opérations « Robins des bois », des coupures ciblées ont visé la SCNF. « Nous nous sommes concertés en amont avec les cheminots pour couper des points concernant le fret ferroviaire », précise la porte parole de la FNME CGT évoquant par exemple des coupures sur des gares de triage. Le blocage d’une sous-station électrique SNCF par les salariés de RTE a néanmoins perturbé le trafic des trains, notamment entre Paris et Clermont-Ferrand. Autre conséquence fâcheuse : 20 000 foyers ont été privés d’électricité à Saint-Nazaire. La ville de Tulle, ancien fief de François Hollande, et le conseil départemental de Corrèze ont aussi fait l’objet de coupures d’électricité et de gaz. « C’est un message envoyé directement au président de la République, commente Marie-Claire Cailletaud. Nous maitrisons notre outil de travail et nous pouvons faire monter la pression auprès du gouvernement. »

L’électricité de la permanence du Medef dans le Morbihan a aussi été coupée. Dans le Var, la CGT Energie 83 a revendiqué la suspension de l’alimentation électrique et la dépose du compteur de la résidence secondaire de Pierre Gattaz, le patron du Medef. « Si nous étions des voyous ou des terroristes, comme l’affirme Pierre Gattaz, nous aurions coupé tout le quartier, voire la ville entière, ce qui n’a pas été le cas », a commenté Olivier Pontone, syndicaliste varois (voir la vidéo).

Suite aux crues, les salariés ERDF de Seine et Marne et de l’Essonne ont accepté la réquisition pour permettre le rétablissement du courant dans les communes inondées. « Ce sont les salariés qui décident tous les jours de leurs actions, avec des formes très variées. C’est eux qui perdent leurs salaires, c’est eux qui décident. » Le mouvement est-il amené à durer ? « Ce mouvement on l’a commencé avant la loi travail. On a le sentiment d’être à un tournant du secteur énergétique. L’application des directives européennes par le gouvernement et l’impact de la loi de transition énergétique ont détruit le service public de l’énergie avec la disparition de GDF dans Engie, l’ouverture à la concurrence dans les concessions hydrauliques, la suppression des emplois... » Pour élargir le mouvement, l’intersyndicale (CGT, FSU, FO, Solidaires, Unef, UNL, FIDL) a lancé une votation citoyenne sur la Loi travail jusqu’au 14 juin, avec l’espoir de mobiliser d’autres secteurs.