8-9 juin

Mobilisation maintenue contre le projet A69 malgré l’interdiction du gouvernement

8-9 juin

par Daphné Brionne

Une centaine de personnes sont poursuivies en raison de leur opposition au projet d’autoroute A69. « L’État tente vainement d’enterrer la contestation mais le Sud-Tarn résiste », selon les Soulèvements de la terre qui appellent à une mobilisation les 8 et 9 juin.

« L’autoroute avance ? Nous aussi ! » avertissent Les soulèvements de la Terre. Le mouvement lance un nouvel appel à manifester contre le projet d’autoroute A69 entre Castres et Toulouse ces samedi 8 et dimanche 9 juin.

Depuis 2007, la population locale se mobilise aux côtés de collectifs citoyens contre ce projet « hérité du siècle passé », né dans les années 1990 afin de « désenclaver le bassin Castres-Mazamet » selon les promoteurs. Le chantier d’autoroute débuté en mars 2023 va artificialiser près de 400 hectares de terres fertiles, détruisant ainsi des espèces protégées et leur habitat, alertent ses opposants.

Par ailleurs, le montant total des travaux, qui ne devaient initialement coûter que quelques millions d’euros, atteindrait plus de 111 millions d’euros. « Pour les usagerères, alors que le tarif initial était de 17 euros, il franchit régulièrement de nouveaux seuils, dépassant aujourd’hui 20 euros l’aller-retour » signale le collectif. La pertinence et la viabilité financière du projet sont régulièrement remises en question par les experts publics, tant la fréquentation serait faible.

Virage répressif

Face à ce projet jugé « inutile, écocidaire et antisocial », les militants multiplient les moyens d’action : recours juridiques, rassemblements, grèves de la faim et de la soif, occupations dans les arbres et au sol… Trois ZAD bloquent actuellement les travaux, deux près de Castres (Tarn) et une à Verfeil (Haute-Garonne). Mais aucune de ces actions n’ont fait fléchir les décideurs politiques, « épaulés de leurs amis concessionnaires Atosca/NGE et de l’appareil judiciaire et policier », selon Les soulèvements de la Terre. Et la répression ne cesse de s’accentuer.

Une semaine après que l’un des opposants ait été violemment interpellé à son domicile, une dizaine de militants du collectif La Voie est Libre, deux responsables de l’association Attac et deux membres du Groupe National de Surveillance des Arbres (GNSA) dont Thomas Brail, ont été convoqués le 30 mai à la gendarmerie de Castres. Parmi les motifs invoqués : complicité de destruction de biens par moyens dangereux, complicité de dégradation avec deux circonstances aggravantes et complicité de violence sur gendarmes lors de la manifestation du 9 décembre 2023 contre les centrales à bitume.

Mobilisation les 8 et 9 juin

« Ces convocations sont une atteinte grave aux libertés fondamentales d’expression et de manifestation. A ce jour, plus de 100 personnes sont poursuivies en raison de leur opposition au projet A69. Ces procédures cherchent à briser la contestation des habitants », dénonce La Voie est Libre. Les personnes convoquées, entrées dans la gendarmerie sous les applaudissements et les chants, ont passé la journée en garde à vue, avant de sortir en milieu de soirée, sans que des poursuites judiciaires soient engagées à leur encontre.

Affiche de la manifestation contre l'A69

« L’État tente vainement d’enterrer la contestation via un puissant appareil répressif, mais le Sud-Tarn résiste ! Contre l’autoroute et toute sa chaîne de production, des gravières en Ariège aux centrales à bitume en Haute-Garonne et Tarn, convergeons massivement dans le Sud-Ouest, pour une mobilisation populaire de grande ampleur. Bloquons les chantiers de l’A69 et reprenons les terres accaparées par Atosca/NGE », appelle Les Soulèvement de la Terre.

En dépit de l’annonce du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin le 4 juin à l’Assemblée Nationale de l’interdiction de la manifestation, les organisations (Extinction Rebellion Toulouse, les Soulèvements de la terre, La Voie Est Libre, la ZadA69) confirment que celle-ci aura bien lieu. Au programme de ces deux jours de mobilisation : des assemblées et tables rondes, mais aussi des spectacles, des concerts et un « vélo scie rap tour ». Un départ en manif’action est prévu le samedi à 13h.

Des alternatives existent

Des projets alternatifs à cette autoroute sont portés par des associations, dont La Voie est Libre. Le collectif propose notamment de réaménager la route nationale déjà existante entre Toulouse à Castres, la RN126, de densifier le réseau de transports en commun, de créer une véloroute nationale bioclimatique sur 87 kilomètres entre Toulouse et Mazamet et d’améliorer la ligne de train.

La modernisation du réseau ferroviaire entre Toulouse et Castres serait en effet une solution de substitution sérieuse à la construction de l’autoroute. Selon Jean Olivier, docteur en écologie, et Benoît Durand, membre de l’association des usagers des transports de l’agglomération toulousaine, quelques aménagements de la voie ferrée existante permettraient d’augmenter la cadence des trains à un passage toutes les demi-heures, contre toutes les heures actuellement. Ce qui représenterait 32 trains par jour dans chaque sens, et plus de 6000 personnes pouvant être transportées.

Mais aucune étude concernant cette alternative ferroviaire ne semble avoir été produite par les pouvoirs publics. « Aucune prise en compte de choix modaux alternatifs n’a été été présentée, au motif que le chemin de fer utilise un autre itinéraire pour relier Toulouse et Castres » indiquait l’Autorité environnementale, en charge de l’évaluation environnementale des projets, dans un avis publié en octobre 2022. Les Soulèvements de la terre appellent donc à continuer « d’élargir la brèche ouverte contre l’A69 et son monde. L’autoroute ne passera pas ! »

Infos pratiques : Le canal Telegram de la mobilisation des 8 et 9 juin, pour avoir toutes les informations. Le programme complet est à retrouver ici.

Photo de une : Course de bolides organisée le 22 avril 2023 lors d’une manifestation contre l’A69/©Les Soulèvements de la terre

Suivi

Mise à jour le 6 juin 2024 à la suite de l’annonce d’interdiction de la manifestation par le ministère de l’Intérieur.