Grève des crèches

Petite enfance : Nadine Morano veut faire régresser la France d’un demi-siècle

Grève des crèches

par Nolwenn Weiler

Non content de s’attaquer au droit à la retraite, le gouvernement s’en prend à la petite enfance. Parents et professionnels des crèches ou des écoles maternelles sont plus décidés que jamais à faire plier le gouvernement sur le retrait d’un décret durcissant les conditions d’accueil et de travail dans le secteur de la petite enfance. Ils ont défilé ce samedi dans toute la France. En vain ?

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Plusieurs milliers de personnes, professionnels de la petite enfance, enfants et parents ont défilé ce week-end, à Paris et dans les grandes villes de Province. Objet de leur ire : le décret concocté par Nadine Morano, secrétaire d’État à la famille, qui prévoit de réduire le nombre d’adultes encadrant les enfants dans les lieux d’accueil collectifs, ainsi que leur qualification. Il faut dire qu’en plus de durcir les conditions de travail des professionnels (changer 8 couches à la fois, ou gérer 4 bébés qui pleurent en même temps, Nadine Morano n’a pas dû le faire souvent), ce décret risque de déboucher sur des conditions de vie spartiates pour les petits.

On sait pourtant aujourd’hui que pour pouvoir se socialiser, les bébés ont notamment besoin « d’une très grande qualité des rencontres individuelles » rappelle Bernard Golse, chef du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker à Paris, dans une déclaration à l’AFP. Et qui se positionne clairement, avec d’autres spécialistes reconnus de la petite enfance, contre les mesures envisagées par le gouvernement, arguant qu’elles sont simplement « contraires à tout ce qu’on a appris depuis 50 ans ». Rappelons aussi que des conditions d’accueil de qualité pour les 0-3 ans facilitent le travail des femmes et participent efficacement à la réduction des inégalités sociales. Des thèmes sans doute trop futiles pour Nadine Morano.

Alerte générale

Depuis le mois de février, quatre journées exceptionnelles de grève des professionnels du secteur de la petite enfance ont eu lieu. La pétition mise en ligne mi-janvier comptabilise presque 45.000 signatures. Avec une demande très claire : le retrait pur et simple dudit décret, et l’amorce de véritables négociations sur l’organisation de l’accueil des 0-3 ans en France, qui vante tellement le taux de fécondité de ses femmes !

Et, pour ne pas s’arrêter en si bon chemin, le collectif « Pas de bébé à la consigne », qui réunit une cinquantaine d’organisations, demande aussi que soient améliorées les conditions d’accueil des enfants en maternelle. Nombre d’enfants de moins de 3 ans y étant scolarisés. « En maternelle, nous demandons la présence d’un enseignant et d’un ATSEM (Agent spécialisé des écoles maternelles, ndlr) à temps plein pour 15 enfants  », « l’arrêt des suppressions de postes dans l’éducation nationale et le rétablissement des postes supprimés (40 000 en trois ans) ». Le collectif envisage même d’aller progressivement « vers la gratuité des modes d’accueil ». Bref, c’est une alerte générale pour la petite enfance qui est déclarée là. Mais Nadine Morano a affirmé qu’elle ne modifierait pas le texte, actuellement au Conseil d’Etat. Et son cabinet a constaté, à propos de la journée de manifestation de samedi, un mouvement « en forte régression », par rapport aux trois autres journées de manifestations précédentes. Épuiser les gens, puis attendre l’été pour faire passer des textes inacceptables, c’est le nouveau mode de gourvernance à la française. Malheureusement assez efficace.

Nolwenn Weiler