Pierre Moscovici veut se recaser à Bruxelles mais agace les eurodéputés

par Agnès Rousseaux

Pierre Moscovici, ex-ministre de l’Économie et des Finances, aimerait bien se recaser à Bruxelles. Et lorgne un poste à la Commission européenne. Celle-ci sera renouvelée à l’automne, après les élections européennes de mai. François Hollande lui a déjà promis qu’il serait le candidat de la France lors de ce renouvellement, a annoncé l’ex-ministre après son éviction du gouvernement : « D’autres aventures m’attendent au service de notre pays. »

L’ancien soutien de Dominique Strauss-Kahn n’a pas vraiment réussi à s’imposer au sein du grand ministère de l’Économie, et à « tenir ses troupes », les six ministres qui se sont succédé à Bercy sous sa responsabilité. La bombe Cahuzac lui a explosé à la figure. Arnaud Montebourg lui a souvent volé la vedette par ses combats et envolées médiatiques contre les délocalisations et les fermetures d’usines. La réforme bancaire qu’il a pilotée a révélé la soumission du gouvernement face au lobby bancaire et son incapacité à reprendre le contrôle d’une finance dérégulée (lire notre article, Réforme bancaire : comment le gouvernement s’est écrasé devant le monde de la finance). Tout comme sa position sur le projet de taxe européenne sur les transactions financières, qu’il juge « excessif » et dont il a voulu réduire la portée. Sur les autres dossiers économiques – Pacte de responsabilité ou Crédit d’impôt pour les entreprises – il n’a fait souvent que gérer le service après-vente de décisions annoncées par François Hollande ou Jean-Marc Ayrault. Il a également multiplié les erreurs politiques, comme sa sortie sur le « ras-le-bol fiscal » en août 2013, terme lancé par le Medef et repris en cœur par l’opposition, qui a plombé le gouvernement dans les débats sur la fiscalité.

Son parachutage à Bruxelles s’annonce compliqué. Sa candidature, proposée par la France, devra être avalisée par les eurodéputés. Problème : les membres de la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen sont très énervés contre lui. Il a annulé à quatre reprises une audition prévue sur la politique économique française, en raison « d’impératifs ». « Je suis très déçue, très très déçue, on dirait que venir se présenter devant nous soit considéré comme un rendez-vous à géométrie variable qu’on n’a aucun complexe à annuler », a lancé la présidente de la commission, Sharon Bowles, le 18 mars. Un député allemand a même proposé de ne plus inviter le ministre français, qui « ne le mérite pas ».

L’ex-ministre avait déjà dû faire face à des critiques, suite aux articles affirmant qu’il s’était endormi pendant une réunion de crise de l’Eurogroupe consacrée au sauvetage de Chypre. Les négociations pour un poste à Bruxelles risquent d’être un peu tendues, pour celui qui a été qualifié de « ministre français le plus ennuyeux ». D’autant que ses derniers efforts pour changer son image n’ont pas été très concluants. On retiendra notamment la médiatisation sur Twitter par sa compagne Marie-Charline Pacquot des aventures de son chat Hamlet, « la seule star de cette famille » (sic). On préférerait en savoir plus sur les options défendues par l’ex-ministre sur la réforme bancaire européenne, que sur la vie de son chat léthargique. Bref, question image aussi, il y a encore du travail, pour celui qui est désormais sur liste d’attente européenne. D’autant que l’ancien ministre délégué aux affaires européennes de Lionel Jospin, entre 1997 et 2002, est très loin d’avoir laissé un souvenir inoubliable à Bruxelles et Strasbourg.