Environnement

Pollution des océans : une expédition part à la découverte du 7e continent

Environnement

par Morgane Thimel

Ils sont neuf et partent pour trois semaines à l’assaut d’une décharge flottant en plein cœur de l’Atlantique nord. Le 5 mai, les membres de l’expédition Septième Continent ont quitté la Martinique et le port du Marin à Fort-de-France pour prendre la direction de la mer des Sargasses. Navigateurs et scientifiques devraient faire route une semaine avant de rejoindre leur destination : le vortex de déchets flottants qui occupe cette zone, également appelé septième continent, gyre ou continent de plastique.

Comprendre le fonctionnement de ce phénomène et en mesurer l’impact sur les eaux environnantes sont les objectifs que se sont fixés les membres de l’expédition. Grâce à des bouées-détecteurs capables de différencier le plastique du plancton, des satellites ou simplement une collecte manuelle, ils devraient relever de précieuses données. Taux de concentration des matières plastiques et leurs formes, analyse des polluants présents dans l’eau, mouvements des courants… et surtout la taille de la gyre. Autant d’éléments pour le moment méconnus des scientifiques dans cette zone du globe.

« Cette catastrophe écologique fait froid dans le dos »

A l’initiative de ce projet, le navigateur Patrick Deixonne, membre de la société des explorateurs français. Différentes courses et traversées l’avaient directement confronté à l’impact de l’activité humaine sur les océans. Depuis, il travaille à leur préservation tout en cherchant à alerter le grand public. « Cette catastrophe écologique qui passe inaperçue, fait froid dans le dos quand on se retrouve nez à nez avec elle. » Son programme a trouvé l’appuie de différents organismes et laboratoires, notamment celui de l’IMRCP de Toulouse, une unité mixte CNRS/Université Paul Sabatier spécialisée dans la réactivité chimique et l’interaction des molécules. Un de leurs chercheurs participe à l’expédition et sera en charge des analyses de l’eau et des poissons récoltés.

Le CNES, l’agence spatiale française, collabore également au programme en fournissant des bouées qui permettront de déterminer les zones de concentration du plastique à l’aide de satellites et des relevées de salinité, températures, luminosité, présence de phytoplancton. Il avait déjà participé à la précédente expédition de Patrick Deixonne vers le vortex du Pacifique nord en mai 2013. A terme, l’explorateur souhaite se rendre dans cinq secteurs où se concentrent des ordures dans différents océans du globe pour y mener des études similaires.

Pour 1 kg de plancton, 5 kg de plastique

Découverte à la fin des années 90, le phénomène des vortex de déchets a d’abord été remarqué dans le nord du Pacifique. Sous l’effet des courants marins qui agissent comme le siphon d’un évier, des détritus, à 80% d’origine continentale, se regroupent dans certaines zones géographiques des océans. Ils flottent sous forme de gros ou minuscules morceaux, juste sous la surface de l’eau. Indétectables sur les images satellites, cette « soupe plastique » n’est visible que du pont des bateaux.

Les scientifiques ont, ainsi, eu la mauvaise surprise de découvrir ce « petit frère » de l’Atlantique nord il y a quatre ans seulement, situé dans la mer des Sargasses. La mer y est particulièrement calme, les courants propices à l’inertie des objets. Pour le moment, son impact sur son environnement est encore méconnu des scientifiques, mais les connaissances sur l’empreinte écologique du septième continent du Pacifique n’est en rien encourageante. Sur un secteur grand comme six fois la France, les fragments de plastique descendent jusqu’à trente mètres de profondeur et sont parfois plus petits que le plancton. D’ailleurs, pour 1 kg de plancton, on y compte 5 kg de plastique.