Le 22 janvier, des centaines de soignants, infirmiers, psychiatres, psychologues, des hôpitaux et structures psychiatriques publiques, et des associations de patients ont manifesté à Paris. Après des mois d’un mouvement social à travers tout le pays, de grèves longues à Amiens, au Havre, à Niort ou Rouen, les revendications du mouvement concernent toujours le besoin de moyens humains pour pouvoir assurer correctement le soin des patients, alors qu’un poste sur quatre n’est pas pourvu, selon l’Union syndicale de la psychiatrie (USP).
Le même jour, à l’Assemblée nationale, la députée de la majorité LREM Martine Wonner, lançait des auditions pour une mission d’information expresse sur le financement de la psychiatrie. Elle en est la rapporteuse. Cette mission doit rendre ses travaux la semaine prochaine, avant que la ministre de la Santé Agnès Buzyn ne présente son projet de loi sur la réforme du système de santé.
Martine Wonner est elle-même psychiatre de profession. Ce qui pourrait gager de sa connaissance du secteur et de la réalité du travail des soignants. Mais juste avant d’entamer son mandat de députée en 2017, elle occupait le poste de directrice médicale et du développement au sein d’un groupe de cliniques psychiatriques privées, le groupe Sinoué. Elle était également membre de son comité de direction. Sa déclaration d’intérêts le précise. À ce titre, elle a gagné plus de 122 000 euros en 2016, et un peu plus de 51 000 euros les six premiers mois de 2017. Elle a cessé cette activité à la prise de son mandat, en juin 2017.
Mener une mission sur le financement de la psychiatrie quand on a soi-même travaillé juste avant son mandat comme responsable dans un groupe de psychiatrie privée, cela peut-il représenter un conflit d’intérêts ? Certains soignants du secteur s’en inquiètent. « J’ai eu une longue carrière professionnelle. Je n’ai pas fait que ça, répond la députée Martine Wonner. J’ai été à l’hôpital public, j’ai ensuite travaillé au sein de deux agences régionales de santé, j’ai aussi été responsable du développement au groupe privé de cliniques psychiatriques et de réhabilitation Générale de santé (racheté depuis par le groupe australien Ramsey, ndlr), et directrice médicale du Samu social de Paris », poursuit Martine Wonner. Pour elle, « il n’y a pas de conflit d’intérêts ». « Justement, je ne suis pas hors-sol », se défend la députée chargée de la mission d’information.
Photo : CC Dominique Bernardini
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