Précarité

« Je suis en passe d’être expulsée de mon logement » : samedi, on manifestait aussi contre l’insécurité sociale

Précarité

par Noan Ecerly

La lutte contre l’insécurité sociale était également à l’ordre du jour de la manifestation parisienne du samedi 5 décembre, mais les mouvements de précaires et chômeurs intéressent peu les grands médias. La loi Sécurité globale a fusionné avec ce premier rassemblement prévu de longue date. Des militants expliquent pourquoi ils et elles se sont mobilisés.

Un peu avant 14 heures, samedi 5 décembre, la Porte des Lilas, à Paris, grouillait déjà de monde. Plusieurs milliers de personnes sont descendues dans les rues contre la loi Sécurité globale. Si la contestation contre le projet de loi attentatoire aux libertés a pris beaucoup de place, des militants contre le chômage et la précarité, comme chaque année début décembre, étaient aussi dans le cortège. « Alors qu’il est annoncé entre 800 000 et un million de chômeur∙es supplémentaires d’ici la fin de l’année, le gouvernement persiste à appliquer sa politique de destruction des droits des chômeur∙es », annonçait l’appel du 5 décembre, signé par de nombreuses organisation et syndicats, dont AC ! (Agir ensemble contre le chômage), Droit au logement ou la CGT.

« Il faut du changement », lâche d’emblée Soimia, militante du Dal (association Droit au logement). « Je veux défendre mes droits. Je suis en passe d’être expulsée de mon logement, depuis le décès de mon mari. » Depuis 20 ans, elle habite dans le 15e arrondissement de Paris et aujourd’hui, elle ne trouve pas de nouveau logement.
Saad, militant CGT se mobilise depuis 20 ans, pour défendre les droits des chômeurs, lutter contre le travail précaire et la privation d’emplois. Il travaille dans la fonction publique, comme bibliothécaire et souhaite défendre son statut : « La plupart des maires se comportent comme des employeurs et détruisent les emplois. »
Saad, (à gauche) : « Chacun devrait bénéficier d’une vie digne. Nous sommes dans un contexte de lutte intéressant, où se croisent les oppositions contre la loi Sécurité globale, la lutte contre la précarité, les luttes des sans papiers et des migrants... »
Magalie, Gilet jaune de première heure, distribue des exemplaires de Plein le dos, (collectif artistique, militant pour une mémoire populaire du mouvement des Gilets Jaunes), dans la manifestation. La manifestante de 48 ans s’inquiète notamment de la réforme de l’assurance chômage. « Ce serait une nouvelle forme de calcul pour invisibiliser la misère, avec moins de chômage mais plus de précarité. On glisse vers de plus en plus de misère, au nom du grand capital », détaille-t-elle.
Habitante de Bagnolet, Magalie travaillait dans l’événementiel. Depuis plusieurs mois, elle est sans activité et regrette la réaction longue de l’État concernant les aides : « Il faut se serrer les coudes, mais je ne sais pas où ça va aller, car ils s’en foutent de la rue ».
« Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles je suis ici : la loi LPPR, la loi Sécurité globale, celle sur les séparatismes, le chômage... », annonce Arthur*, doctorant en cinéma. Il est bien conscient qu’une situation précaire finira par le rattraper : « Dans mon domaine, seulement 2 ou 3 postes s’ouvrent chaque année. Je devrai faire de la vacation mal payée avant, avoir un job alimentaire… C’est ce qui arrive à mes collègues ».
Cécile, 68 ans, militante de Lutte ouvrière, bat le pavé tous les ans contre le chômage. « Je suis scandalisée par la situation des chômeurs. Ils sont tenus dans la misère, on les empêche de vivre », affirme-t-elle.
Un peu avant que le cortège commence à avancer, Cécile révise les slogans qu’elle a imprimés. Pour elle, la conjonction entre deux causes, contre la loi Sécurité globale et le chômage est importante : « Il faut s’en saisir, il n’y a pas assez d’occasions de dire sa colère ».

La manifestation s’est dirigée vers la Place de la République mais a vite été longuement stoppée avenue Gambetta. Des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, sous les nuages de gaz lacrymogène, ont éclaté en début de cortège et ont duré plusieurs heures.

« Vivre oui ! Survivre non ! » L’avenue Gambetta sous les lacrymogènes.

Récit et photographies par Noan Ecerly

* Le prénom a été changé.