Bruxelles

Un militant risque 5 ans de prison pour avoir détourné un panneau publicitaire

Bruxelles

par Mathilde Dorcadie

À Bruxelles, un militant opposé aux traités de libre-échange (Tafta, appelé aussi TTIP, et Ceta) risque entre six mois et cinq ans de prison, ainsi qu’une amende pouvant aller jusqu’à 125 000 euros ! Le procès d’Hugo P. s’est ouvert au tribunal correctionnel de Bruxelles le 5 septembre. Le ministère public belge (appelé aussi procureur du Roi) l’accuse de dégradations et de piratage informatique. Hugo P. s’est introduit en juillet 2016 dans les ordinateurs de plusieurs écrans publicitaires bruxellois afin de diffuser des messages détournés dans le cadre de la campagne « TTIP Game Over », au moment où ce traité commercial entre l’Union européenne et les États-Unis était en négociation. Cette action a été réalisée par plusieurs personnes mais Hugo P. est le seul prévenu dans cette affaire : il n’a pas voulu dénoncer aux enquêteurs les autres personnes du « commando » (voir ci-dessous la vidéo d’une des actions de piratage réalisées à l’été 2016).

Un écran publicitaire piraté à côté de Schumann contre le TTIP from zin tv on Vimeo.

Un comité de soutien s’est créé afin de défendre le militant — par ailleurs conseiller communal — et de protester contre un « procès politique », destiné à dissuader d’autres actions de ce type. Les activistes anti-Tafta rappellent qu’il s’agissait d’une action « non-violente et de désobéissance civile, réalisée par des citoyens pour faire entendre leur voix de manière légitime ». Cette action de détournement de panneaux publicitaires faisait partie d’un ensemble d’actions menées dans la capitale européenne à ce moment. L’avocat du prévenu, Me Olivier Stein, a rappelé lors d’un rassemblement qui s’est tenu devant le tribunal, que plusieurs policiers de la Computer Crime Unite (contre les crimes informatiques) avaient été affectés spécialement à cette enquête.

« Le choix a été fait de consacrer des moyens sur ces faits, alors que cette unité ne compte que peu de policiers et qu’il y a des crimes bien plus graves à s’occuper ! Un choix confirmé par les policiers eux-mêmes, a-t-il dénoncé. C’est une façon de faire taire certaines formes de liberté d’expression. On voit une intention de la part du parquet de pratiquer une tolérance zéro quant à des actions qui peuvent avoir un caractère politique. »

Près de 250 personnes s’étaient rassemblées devant le tribunal, dont plusieurs associations de défense des droits humains. Elles s’inquiètent de la multiplication de procès intentés à des militants et la criminalisation de leurs actions. Elisabeth Lagasse, du comité de soutien, est aussi venu rappelé que, pour eux, la lutte est toujours d’actualité, puisque le Ceta — l’accord commercial entre l’UE et le Canada — est toujours en cours de ratification. Devant la forte présence à l’audience de militants, le juge de séance, en accord avec les parties, a reporté celle-ci au 12 février 2019.

Pour suivre les prochains déroulement, la page Facebook du comité de soutien