SNCF

Vers l’abandon du fret ferroviaire ?

SNCF

par Ivan du Roy

Cheminots et écologistes dénoncent ensemble le nouveau plan fret de la SNCF. Ils reprochent à l’opérateur public de se désengager du fret ferroviaire « de proximité ». Cette activité, dite « wagons isolés », concerne le transport de marchandises pour des entreprises moyennes. Elle nécessite de regrouper en convoi les « wagons isolés » affrétés par différents clients, puis de les acheminer par rail au plus près de leur point de destination, ce qui signifie disposer d’un maillage de gare de marchandises relativement dense. CGT, CFDT, France nature environnement, le Réseau action climat ou Les Amis de la terre critiquent, dans un communiqué commun du 19 mars, « l’abandon programmé de 60% » de cette activité, qui sera reportée sur le transport routier et les poids lourds.

Cet abandon est, pour les syndicats et les ONG, non seulement anti-écologique mais aussi anti-social. Le report de cette activité sur la route va générer 300 000 tonnes équivalents CO2 supplémentaires par an (soit l’équivalent de la pollution engendrée par la consommation de 30 000 personnes pendant un an), alors que les émissions de CO2 liées au transport routier ont augmenté de 27% en France depuis 1990. Les syndicats craignent également que cet abandon ne menace 8000 emplois à la SNCF et ne profite, dans la perspective de l’ouverture à la concurrence du fret, à des opérateurs privés « low cost contournant les standards sociaux, environnementaux et de sécurité actuels par dumping ».

En 2007, la SNCF avait déjà fermé 262 gares au transport de marchandises. L’activité fret a accumulé les déficits chroniques qu’est venue aggraver la crise. Précisons que son concurrent direct, le transport routier, bénéficie d’une exonération partielle de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Et que les statuts, rémunérations et conditions de travail des conducteurs routiers sont, en général, plus précaires et défavorables. Il s’agit bien d’un choix de société : « Le fret ferroviaire de proximité, cette technique du wagon isolé, est stratégique pour relever le défi de la lutte contre le changement climatique et celui de l’aménagement du territoire. S’en désengager pour un opérateur public, comme la SNCF, est absurde et cela constitue une faute lourde pour la France », estiment écologistes et cheminots. Une stratégie en rupture avec les décisions actées par le Grenelle de l’environnement. Avec l’abandon de l’idée de taxer les émissions de CO2, on commence à en prendre l’habitude.