L’accord de libre-échange UE-Mercosur pourrait être annoncé comme conclu lors du sommet du Mercosur qui se tient ces 5 et 6 décembre à Montevideo (Uruguay). A cette occasion, plus de 400 organisations de la société civile appellent la Commission européenne, les États-membres de l’UE et du Mercosur à stopper et abandonner cet accord de libre-échange, qu’elles dénoncent comme l’un des plus nocifs jamais négocié.
Le collectif national Stop Mercosur propose aux internautes d’interpeller en ligne Emmanuel Macron et Ursula Von der Leyen, respectivement président de la République et présidente de la Commission européenne, pour les appeler à ne pas « finaliser cet accord et à l’abandonner au plus vite ». Voici ci-dessous l’appel des 400 organisations.
Nous, organisations signataires d’Amérique latine et de l’Union européenne, nous unissons pour rejeter l’accord commercial et d’association UE-Mercosur. Nous appelons les responsables politiques des deux côtés de l’Atlantique à stopper enfin cet accord commercial toxique.
Négocié à huis clos, cet accord manque cruellement de participation publique et de contrôle démocratique. Le Médiateur européen lui-même a critiqué le manque de transparence de la Commission européenne. Aujourd’hui, la Commission envisage de changer le processus de vote via une « scission » de l’accord, permettant ainsi de contourner les vétos des pays membres.
Des centaines d’organisations de la société civile et de parlementaires ont condamné cette manœuvre, car elle est une attaque contre les processus démocratiques. Pire, les groupes les plus touchés – les travailleurs, les petits agriculteurs, les communautés autochtones et les femmes – ont été exclus de la négociation de cet accord et en subiront pourtant les pires effets.
« Il promeut des modèles agricoles destructeurs »
Cet accord renforcera l’échange inégal entre le Sud et le Nord global, perpétuant ainsi des structures commerciales (néo)coloniales. Il promeut des modèles agricoles destructeurs qui déplacent les petits agriculteurs et les communautés autochtones, tout en stimulant les exportations de produits agrochimiques toxiques, y compris ceux interdits dans l’UE. Ces pratiques agricoles non durables, y compris l’élevage industriel, menacent la souveraineté alimentaire et le bien-être animal dans les deux régions.
Les travailleurs des pays du Mercosur perdront leur emploi et subiront une détérioration de leurs conditions de travail. Les femmes seront encore plus touchées, notamment à cause de la privatisation des services publics, encouragée par les accords de libre-échange (ALE). Des études montrent que cet accord présente des risques économiques majeurs, aggravant davantage les inégalités, et freinant le développement durable et la (ré-)industrialisation dans les pays du Mercosur.
L’environnement grand perdant
L’environnement sera aussi un des grands perdants de l’accord. Aucune annexe environnementale ne pourra atténuer les dommages à long terme que cet accord causera ; il s’agit d’un simple verdissement de façade. L’accord UE-Mercosur accélérera la déforestation, aggravera la crise climatique et éloignera encore plus nos régions des objectifs de justice climatique.
Cet accord est négocié avec des gouvernements dirigés par des climato-sceptiques en Argentine et au Paraguay, alors que les forêts vierges brûlent – en raison de la déforestation massive causée par l’agrobusiness – et que le Brésil est frappé par des sécheresses sans précédent.
En Argentine, l’anarcho-capitaliste autoproclamé Javier Milei, membre actif du mouvement d’extrême droite mondial, a plongé le pays dans la misère. La pauvreté a atteint des niveaux sans précédent et les droits fondamentaux sont piétinés. Les manifestations pour la justice sociale sont violemment réprimées, plus de 60% des enfants argentins souffrent de la faim et des services essentiels comme l’éducation et la santé sont démantelés. La combinaison des politiques désastreuses de Milei et de cet accord commercial obsolète est un cocktail explosif.
Le renforcement des liens entre l’UE et le Mercosur nécessaire
Les politiciens qui promeuvent cet accord pour contrer l’influence de la Chine dans la région du Mercosur sont piégés dans une idéologie libre-échangiste qui privilégie les profits des entreprises au détriment des populations et de la planète. Le renforcement des liens entre l’UE et le Mercosur est incontestablement nécessaire, mais il nécessite solidarité, égalité, coopération, durabilité et démocratie – pas l’approfondissement des asymétries commerciales. Cela vaut non seulement pour l’accord UE-Mercosur, mais aussi pour la “modernisation” des accords de libre-échange UE-Mexique et UE-Chili, tout aussi problématiques.
La solution est claire : les décideurs politiques des deux côtés de l’Atlantique doivent respecter leurs engagements en matière de droits de l’homme, sociaux, climatiques et environnementaux et stopper immédiatement ces négociations commerciales toxiques.
Un autre commerce est possible – basé sur la solidarité, la démocratie, la coopération mutuelle et l’égalité ! Stoppez l’accord UE-Mercosur maintenant !
– retrouvez la liste des 400 organisations signataires sur le site du collectif national Stop Mercosur
– pour interpeller Emmanuel Macron et Ursula Van der Leyen
Photo de une : action réalisée par la Confédération paysanne à Vannes le 18 novembre 2024 pour dénoncer l’accord de libre-échange UE-Mercosur présenté comme un accord « viande contre voitures ». © Confédération paysanne du Morbihan