Énergies fossiles

Concentration des médias et énergies fossiles : un rapport décrypte l’empire industriel de Kretinsky

Énergies fossiles

par Rédaction

Actionnaire minoritaire du Monde, majoritaire de Marianne, le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky est d’abord le propriétaire d’un empire actif dans les énergies fossiles. Une organisation tchèque publie un rapport sur son groupe.

C’est un actionnaire minoritaire du Monde, mais aussi le propriétaire des hebdomadaires Marianne et Elle. Daniel Kretinsky, milliardaire tchèque, a aussi racheté le magazine Usbek et Rica et devrait acquérir ce printemps le groupe d’édition français Editis, tout en cherchant aussi à racheter le groupe de grande distribution Casino. L’homme possède également de nombreux médias en République tchèque : la maison d‘édition Czech News Center ; le quotidien national le plus lu, Blesk ; un tabloïd, un quotidien économique, un hebdomadaire d’information, une radio et un quotidien en ligne.

Daniel Kretinsky est par ailleurs à la tête - c’est sa première activité - d’un grand groupe industriel énergétique : EPH. Celui-ci exploite des mines de charbon, des centrales à charbon et des infrastructures gazières à travers l’Europe. EPH « est la plus grande entreprise nationale tchèque et exerce une influence notable dans de nombreux pays d‘Europe », souligne l’initiative tchèque Re-set, « plateforme pour la transformation socioécologique », qui vient de publier en français un rapport sur le groupe EPH et ses activités. Re-set est membre de la campagne Europe Beyond Coal, qui milite pour la fin de l’extraction et de la combustion des combustibles fossiles.

Importateur du gaz russe

Daniel Kretinsky est le propriétaire majoritaire d’EPH. Il a multiplié sa fortune au cours des dernières années « tout en devenant l’une des personnes les plus riches de la République tchèque », pointe Re:set. « En termes de capacité actuellement installée de centrales à gaz, EPH se situe au huitième rang des entreprises énergétiques européennes », précise Re:set. EPH possède des infrastructures gazières et charbonnières en Italie, France, Allemagne, Pays-Bas, Royaume-Uni, Irlande, Slovaquie et en République tchèque.

EPH a racheté des mines et centrales à charbon en Allemagne, et en 2019 les centrales à charbon françaises de Saint-Avold, en Lorraine, et Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône. La centrale de Saint-Avold a été mise à l’arrêt en 2022 avant une réactivation temporaire à la fin de l’année. Celle de Gardanne est arrêtée depuis 2021. Un projet de reconversion en centrale à bois et hydrogène est en discussion.

Depuis une dizaine d’années, la stratégie d’EPH « est le détournement des fonds de décarbonation européens », accuse Re:set : « Commençant par racheter de vieilles centrales à charbon puis s’efforçant maintenant d’empêcher leur fermeture en demandant des compensations à l‘État pour leur arrêt. » L’organisation tchèque écrit aussi que « les capitaux ainsi obtenus sont ensuite réinvestis dans le développement des infrastructures gazières, renforçant de ce fait notre dépendance à l‘égard de la Russie ».

Car EPH est aussi l’un des principaux importateurs de gaz fossile russe en Europe. L’une des filiales d’EPH, la société slovaque Eustream, exploite des gazoducs qui transportent ce combustible depuis la Russie à travers l‘Ukraine et la Slovaquie. En conséquence, l’entreprise « perdrait des milliards en cas d‘interruption de l‘approvisionnement en gaz russe ».

Empire médiatique et énergétique, EPH est acteur de la concentration des médias et du maintien des énergies fossiles aux dépens du climat, accuse le rapport de Re:set. « Le pouvoir accru d’EPH menace gravement l’avenir de la politique climatique européenne, de la justice sociale et de la démocratie », dénonce l’organisation tchèque.

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Photo de une : La centrale Émile-Huchet à Saint-Avold. CC Jean-Marc Pascolo via WIkimedia Commons.