Julia Cagé : « Les médias indépendants sont indispensables au débat démocratique » - commentaires Julia Cagé : « Les médias indépendants sont indispensables au débat démocratique » 2022-05-25T13:35:28Z https://basta.media/julia-cage-les-medias-independants-sont-indispensables-au-debat-democratique-soutenir-basta#comment12288 2022-05-25T13:35:28Z <p>Les entreprises de l'industrie médiatique traditionnelle sont des entreprises comme les autres, représentant des intérêts privés ou des intérêts gouvernementaux, dans un système capitaliste féodal ou un système capitaliste administratif, ces distinctions n'étant au final très périphérique et ne provoquant pas d'effet qualitatif sur leur production.<br class="autobr"> Il est clair que le rêve d'une entreprise capitaliste c'est de garantir ses revenus et ses profits et de collectiviser ses coûts si ce n'est, tant qu'à faire, de les externaliser. C'est l'Histoire du capitalisme, de l'industrie et de l'état-nation même. Et c'est exactement comme ça qu'on se retrouve avec des systèmes de production complètement irresponsables et absolument nocifs.<br class="autobr"> Il est en effet nécessaire de penser et d'agir en faveur de nouvelles structures socio-économiques, afin de couvrir des besoins communs. Ces nouvelles structures ne suivront sans doute pas la structure hiérarchique pyramidale actuelle, pourront prendre la forme de coopératives proposant des services en circuit court par exemple. Mais avant de s'intéresser à cette question, qui en fait touche absolument tous les secteurs, on peut commencer par adopter une approche systémique de la question, dans l'optique d'assainir un peu la réflexion et d'évacuer les différentes manipulation.<br class="autobr"> Dans un premier temps remarquons que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen parle originellement de liberté de presse, sans besoin de préciser que c'est un droit de l'homme et du citoyen donc individuel puisque c'est dans l'intitulé : ce n'est pas une reconnaissance d'une corporation et d'un secteur économique dominé par des intérêts particuliers dont l'existence serait absolument nécessaire à chacun. C'est là que se trouve la tentative d'arnaque : il faut cesser de considérer la « liberté de la presse » comme corporation, mais une « liberté de presse » relativement aux individus qui peuvent librement s'associer par ailleurs pour l'exercer. La « liberté de presse » n'est ni plus ni moins qu'un droit d'utiliser des moyens de communication sur des espaces privés, publics ou intermédiaires. Ainsi toutes les exceptions, toutes les protections, tous les statuts, tous les droits catégoriels donnés à la corporation des journalistes doivent être reversés dans les droits individuels. Ça n'empêche pas que journaliste soit un métier, mais aussi bien que tourneur-fraiseur, livreur, chauffeur de taxi ou autre : c'est une compétence, pas un statut avec garantie de revenu. Remarquons que la protection actuelle de l'industrie traditionnelle s'explique exactement par le phagocytage de la représentation politique et des élections qu'elle permet, et par le clientélisme (on pourrait commencer par interdire aux entreprises médiatiques d'être en contrat avec l'état par ailleurs... remarquons que le secteur médiatique est dominé par l'industrie de l'armement, la sidérurgie, le bâtiment). Ainsi la soit-disant lutte contre les GAFAM n'est que discours : les états signent avec eux tout un tas de contrats, et organisent leurs situations monopolistiques afin de s'assurer d'avoir des interlocuteurs sur lesquels il peuvent jouer leur clientélisme. En matière de logiciel et de technologie de l'information, les gouvernements et les entreprises capitalistes courent un véritable risque : le logiciel libre, le travail libre, la copie libre, l'instauration de communs.</p> <p>L'information n'est pas un « bien public », ce n'est pas non plus une « chose privée ». Avant de trouver le modèle économique qui rendra viable cette activité de production de « bien commun », commençons par le rendre possible en distinguant les forces qui luttent contre ce type de nouvelle organisation (vers un ordre libriste ?) plutôt que de les prendre pour des forces alliées (qui s'en frottent les mains). Ne cherchons pas à garantir des profits, même pour des « gentils ».</p>