Betty est factrice. Elle vient d’être mutée à une vingtaine de kilomètres de Leyr, village de Meurthe-et-Moselle, dont le bureau de poste, « restructuré » avant l’été, a vu partir ses quatre facteurs. Le 7 décembre, son véhicule postal se retourne sur une petite route, près d’Eulmont. Simple accident de voiture sur une petite route de campagne rendue glissante par le givre ? Pour les habitants de Leyr, fédérés au sein d’un collectif qui s’oppose à la fermeture de leur agence postale locale, il n’en est rien. Pour eux, cet accident est une des conséquences du processus de privatisation de La Poste.
« La transformation de la fonction de facteur en métier de livreur, la soif inassouvie de rentabilité, de performance et de gains de productivité », constituent également, pour le syndicat Sud-PTT, « autant d’éléments responsables de cet accident ». Les syndicalistes n’hésitent pas à comparer l’avenir de La Poste au présent de France Télécom – Orange, marqué par la profonde déprime de ses salariés et une vague de suicides. Combien de morts faudra-t-il « pour que la direction de La Poste et les élus de la Nation changent de route ? ». Si possible avant un accident plus dramatique.
Alors que la mobilisation des habitants de Leyr a obligé la direction départementale à négocier, Marie-Pierre, une des quatre factrices mutées à une vingtaine de kilomètres de là, confiait à Basta! : « Moi qui n’avais jamais pris ma voiture pour aller au boulot, je me retrouve à faire quarante kilomètres par jour (aller-retour, ndlr). La fatigue, le stress, les conséquences écologiques... ça compte. Mais c’est surtout le lien social qui est en danger. » Désormais, non seulement le travail des salariés de La Poste est remis en cause, mais avec les restructurations des agences postales en campagne, c’est même leur intégrité physique qui est en jeu.