Révolution du Jasmin

Tunisie : le principal syndicat ne soutient pas le gouvernement de transition

Révolution du Jasmin

par Nolwenn Weiler

À peine nommés, trois représentants du gouvernement tunisien de transition, membres de la centrale syndicale UGTT, ont démissionné à la demande de leur organisation. Pendant que le nouveau gouvernement traverse ses premières crises, l’opposition cherche à concilier maintien de la pression dans la rue et préservation des structures étatiques.

Photo : Alexandro Rosinha. Tunis, le 18 janvier

Le gouvernement tunisien, tel qu’il est actuellement composé, tente de confisquer au peuple sa révolution. Notamment en conservant plusieurs ministres de l’époque de Ben Ali à des postes très importants (ministères de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères). C’est ce que clament de nombreux opposants qui, tout en soutenant l’importance d’un gouvernement de transition pour gérer l’État, demandent leur démission.

Mardi 18 janvier, ce sont finalement les trois représentants de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), puissant syndicat, entrés lundi 17 janvier au gouvernement, qui ont rendu leur tablier en signe de protestation : Anouar Ben Gueddour, secrétaire d’État auprès du ministre
du Transport et de l’Équipement, Abdeljelil Bédoui, ministre auprès du
Premier ministre, et Houssine Dimassi, ministre de la Formation et de
l’Emploi. Mobilisée aux côtés de la rue, qui refuse elle aussi ce gouvernement d’Union nationale formé lundi 17, l’UGTT exige la dissolution de l’ancien parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), que l’Internationale socialiste vient d’ailleurs d’exclure de ses rangs.

Des risques d’ingérence étrangère ?

Partagée entre la nécessité de maintenir la pression, et celle de calmer le jeu, l’opposition, soutenue par les manifestants, tient à maintenir debout l’État, pour ne pas laisser le pays à la merci des bandes armées, composées d’anciens membres de la police personnelle du dictateur, qui sèment la terreur. Ou pire, risquer une ingérence étrangère, notamment de la Libye. Le colonel Kadhafi voit en effet la révolution de Jasmin d’un très mauvais œil. La voir capoter ne lui déplairait pas.

La frontière commune entre la Libye et la Tunisie est une ligne de passage potentiel d’armes et d’argent, qui pourraient être remis à ces bandes armées. C’est d’ailleurs le long de cette frontière qu’a été arrêté ce week-end le général Ali Sériati, patron de la nébuleuse sécuritaire de Ben Ali, qui comptait plus de 100.000 hommes. Des centaines de milliers de Tunisiens travaillent aussi en Libye. Le colonel Kadhafi peut décider de les expulser du jour au lendemain pour déstabiliser davantage encore la situation intérieure tunisienne.

Nolwenn Weiler