Depuis juin 2013, des paysans de l’est de la Pologne, près de la frontière avec l’Ukraine, bloquent un forage de Chevron. Sur les terres de la commune de Zurawlow, ils ont dressé un campement, et ont baptisé leur mouvement de résistance du nom d’« Occupy Chevron », en référence aux activistes qui avaient occupé des places dans les cités américaines en 2011 (lire cet entretien). Alors que la Pologne est aujourd’hui l’un des principaux territoires de prospection des compagnies minières et pétrolières, leur lutte est devenue emblématique des anti-gaz de schiste en Europe.
C’est dans ce contexte qu’est sorti en salle le 26 mars, Holy Field Holy War, un film calme et majestueux sur la résistance des paysans polonais de Zurawlow. Un an avant le début de la lutte d’Occupy Chevron, le documentariste Lech Kowalski a longuement filmé les agriculteurs de cette région très rurale. Ils racontent leur désarroi et leur impuissance face à l’arrivée d’une agriculture industrielle qui pollue leur environnement direct par son usage excessif d’engrais, ses épandages gargantuesques de lisier, ses rejets de produits toxiques. Cette micro-société déjà meurtrie voit un jour apparaître un nouvel ennemi : la colonne de camions vibreurs, mis en branle par des sous-traitants locaux de la multinationale américaine.
Holy Field, Holy War Bande-annonce par toutlecine
No Gazaran sort en salle le 2 avril. Cela fait plus de deux ans que les documentaristes Doris Buttignol et Carole Menduni filment l’affaire du gaz de schiste en France et au niveau européen. Elles interrogent les mouvements d’opposition, mais aussi les élus locaux, régionaux et européens, des experts juristes, des hydrogéologues, des médecins, des toxicologues, des ingénieurs... Ce qui ressort de cette investigation est une interrogation du processus démocratique. Qui décide du bien commun, de ce qui est bénéfique pour la communauté. Qui assumera les conséquences de ces décisions ?
Dans cette controverse, les décideurs n’ont pas eu à prouver que ce projet est bénéfique et approprié pour la collectivité. À contrario, ce sont des citoyens et des élus locaux qui ont eu la charge de la preuve, c’est à dire réunir les informations pour tenter d’éclairer la population de la nature des bénéfices/risques. C’est cette histoire qu’elles ont voulu raconter. Donner à comprendre la nature et la gravité des risques évalués à partir du retour d’expérience américain, mais également resituer dans quel contexte sont arrivés les gaz de schiste.
– Plus d’infos sur No Gazaran
– Le site du film Holy field holy war
Photo : © Doris Buttignol