Dans La Pub Au Pays Des Merveilles, Matthieu Lietaert [1] part aussi bien à la rencontre de l’industrie publicitaire que des lanceurs d’alerte qui s’y opposent, et cherche à créer un débat de société urgent sur le manque de régulation dans un secteur publicitaire en pleine effervescence technologique. « Tout le monde se rend compte que les révolutions des datas, des neurosciences et de l’Internet offrent aux publicitaires de nouveaux outils beaucoup plus puissants qu’avant. Et pourtant, il y a un paradoxe énorme entre l’étendue d’une publicité de plus en plus personnalisée, la méconnaissance de ce qui ce cache sous le capot, et l’absence quasi totale de législation contraignante dans le domaine », explique Matthieu Lietaert.
La Pub Au Pays Des Merveilles from Matthieu on Vimeo.
Parmi les personnes de l’industrie, on retrouve Jacques Séguéla, connu comme l’un des hommes clés de la pub en France depuis les années 70. On y rencontre également des ’geeks’ qui nous parlent des nouvelles technologies de la pub. Le film donne aussi la parole à des psychologues dont les études intéressent l’industrie au plus haut point. « On croit souvent qu’une publicité est le résultat d’une équipe de créatifs qui ont de l’humour et du talent. Il est temps que le législateur se rende compte qu’au 21e siècle, le rôle des scientifiques est fondamental dans la chaine de montage publicitaire. Ceux-ci permettent à l’industrie de, je cite, "comprendre implicitement la boîte noire des consommateurs" », précise le réalisateur.
« Ceux qui nous vendaient hier des voitures et des télévisions, nous vendent aujourd’hui des idéologies, des partis politiques et des présidents »
Les quatre plus grands groupes de publicité au monde (Omnicom, Interpublic, Publicis, WWP) possèdent les cinq plus grandes entreprises de relations publiques ou de lobbying politique au monde (FleishmanHillard, Burson-Marsteller, Hill+Knowlton, Weber Shandwick, MSL group). « En d’autres mots, ceux qui nous vendaient hier des voitures et des télévisions, nous vendent également aujourd’hui des idéologies, des partis politiques et des présidents... Ce n’est pas d’ailleurs pas pour rien si Mark Zuckerberg (Facebook) a du s’expliquer sur le scandale du Cambridge Analytica devant le Parlement Européen [2]. Les conséquences de la nouvelle publicité politique ciblée sont tangibles : Steve Bannon, (l’ancien) chef de campagne de Trump, est sans doute l’un des premier a l’avoir compris. Son tour d’Europe pour conseiller les partis d’extrême-droite risque de faire mal aux élections en mai ».
Enfin, le film interroge le rapport entre l’industrie publicitaire dont le budget mondial est dix fois plus grand qu’en 1950, la production et la vente des entreprises qui n’ont cessé de croitre, et la quantité de gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère. « On ne cesse de nous montrer les conséquences du changement climatique (incendie, inondation, etc.) sans vraiment parler de ses causes. Il n’y a aucun doute qu’une régulation de la publicité aurait un impact sur l’équation du changement climatique. La question de société que nous devrons tous affronter tôt ou tard est de savoir si nous sommes prêts à repenser radicalement le système de consommation à outrance actuel. Je pense sérieusement que c’est un débat de société qu’il faut avoir, et maintenant », conclut Matthieu Lietaert
Plus d’informations : lapubaupaysdesmerveilles.net