Le groupe français Vinci se prépare à construire une partie de l’oléoduc TransMountain, au Canada. Cet oléoduc triplera les capacités de transport de pétrole issu des sables bitumineux de l’Alberta vers la côte Pacifique, près de Vancouver, en vue de son exportation sur les marchés mondiaux. Le contrat remporté par Vinci pour « plusieurs centaines de millions » porte sur une section de l’oléoduc dans la vallée de la rivière Coquihalla, en Colombie-Britannique.
L’annonce intervient au moment même où s’ouvre un procès opposant l’entreprise de logistique Kinder Morgan, porteuse du projet, à plusieurs communautés autochtones, à des organisations écologistes ainsi qu’aux villes de Vancouver et Burnaby, soutenues par les autorités de Colombie-Britannique. Les plaignants accusent l’entreprise d’avoir manqué à ses obligations d’études d’impact environnemental et de consultation des populations autochtones. Ils craignent aussi les conséquences potentielles d’un afflux de pétroliers géants au large de leurs côtes. Ce qui n’a pas empêché Kinder Morgan, forte de l’autorisation officielle du Premier ministre canadien Justin Trudeau, de lancer les travaux.
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Au même moment, à l’autre bout du Canada, le projet d’oléoduc lui aussi très controversé Énergie Est vient d’être officiellement et définitivement abandonné par son promoteur, la firme TransCanada. Cet oléoduc visait à acheminer le pétrole des sables bitumineux vers la côte Est et, potentiellement, vers l’Europe. Ce projet a fait l’objet d’une forte résistance populaire, notamment au Québec (lire notre enquête : Au Québec, écologistes et Amérindiens entrent en guerre contre un nouveau projet d’oléoduc géant).
Vinci, du BTP aux oléoducs et gazoducs
Les projets d’oléoducs géants comme le KeyStone XL – abandonné par l’administration Obama mais que Trump souhaiterait relancer–, Énergie Est ou encore TransMountain font l’objet de batailles majeures en Amérique du Nord en raison de leur caractère stratégique, à la fois pour l’industrie pétrolière et pour la cause du climat. Leur construction permettrait de poursuivre le développement des sables bitumineux canadiens, une source d’énergie potentiellement considérable mais extrêmement coûteuse et émettrice de gaz à effet de serre.
Si l’on met souvent en avant le rôle des intérêts pétroliers et gaziers dans la promotion de ce type d’infrastructures, le secteur de la construction et du BTP en est l’autre grand bénéficiaire. Vinci, à travers sa filiale Spiecapag, s’affiche comme « l’une des premières entreprises mondiales dans le domaine des oléoducs, des gazoducs et des systèmes associés ». La multinationale française s’occupe en ce moment même du chantier du gazoduc lui aussi très controversé Trans Adriatic Pipeline en Albanie et en Grèce [1]. Après avoir été temporairement mise en échec en France, avec le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, Vinci s’expose désormais à de fortes mobilisations au Canada.
Olivier Petitjean