Licencié par Veolia pour avoir refusé de couper l’eau aux usagers, un salarié a décidé d’engager une procédure devant le conseil des Prud’hommes. L’audience est fixée au 16 janvier à 14h au Palais de justice d’Avignon. En avril 2013, Marc, employé depuis 20 ans chez Veolia Eau à Avignon, reçoit une lettre de licenciement. Motif ? « Refus de mettre en œuvre les fermetures de branchements faisant suite aux non-paiements des factures ». Ce technicien au service clientèle aurait contrarié, entre 2006 et 2013, la coupure de près d’un millier de branchements d’arrivée d’eau.
« Il se refusait à couper l’eau, il préférait négocier avec les familles et trouver d’autres solutions comme des échelonnements de paiement », indique Thierry Lapoirie, secrétaire général de l’Union locale CGT Pays d’Avignon contacté par Basta!. « Il n’a jamais été mentionné ni dans son contrat de travail ni dans sa fiche de poste qu’il devait couper l’eau », ajoute le syndicaliste. Ce que dément Bruno Chaloin, responsable Veolia pour le secteur Gard-Lozère-Alpes-Provence : « Sur sa fiche de poste, il y a cette mission [de coupure de branchements] et nous sommes une société avec des règles. On ne choisit pas les tâches qu’on a envie d’effectuer ».
Des coupures non réglementaires ?
« Ces coupures concernent des personnes mauvais payeurs », et non des foyers en difficultés, a par ailleurs précisé le responsable de Veolia. La décision de couper l’eau aux usagers relevait « d’une procédure conforme à la réglementation ». Un avis que ne partage pas le Collectif des usagers de l’eau du Grand Avignon. « Veolia coupe l’eau aux usagers sans discernement », confie Marcelle Landau, présidente du Collectif, à Basta!. Nous avons recueilli plusieurs témoignages d’usagers montrant que Veolia ne respecte pas la législation sur les coupures et intervient sans respect des délais, mettant les abonnés devant le fait accompli ».
Selon le décret du 13 août 2008, une lettre de rappel doit être envoyée au consommateur qui doit être avisé de la coupure au moins vingt jours à l’avance. « Le fait de pouvoir couper l’eau donne un pouvoir exorbitant à Veolia. Ils mettent les gens à genoux, c’est intolérable ! L’eau n’est pas une marchandise », déplore Marcelle Landau. Dans les faits, une coupure puis une réouverture sont chacune facturées 40 euros. Selon Veolia-Eau, environ 500 personnes ferait l’objet chaque année de coupure d’eau dans une ville comme Avignon qui compte 45 000 foyers abonnés.
Le technicien rebelle d’ErDF non licencié
L’audience aux Prud’hommes le 16 janvier est publique. Un appel à mobilisation a été lancé par l’union locale CGT, soutenu par le Front de gauche d’Avignon et le Collectif des usagers de l’eau. « Nous demandons en priorité la réintégration sans conditions du salarié », précise la CGT. Une pétition intitulée « viré pour le droit à l’eau » est également en ligne, et une autre pétition du Collectif des usagers de l’eau est téléchargeable ici [1]. Cette affaire fait écho à celle de Jef Duval, agent d’ErDF syndiqué à la CGT, menacé de licenciement en 2012 pour avoir refusé de couper l’électricité chez des ménages pauvres (lire notre article). Au terme d’une forte mobilisation, le licenciement de l’agent d’ErDF n’a finalement pas été prononcé.
[Mise à jour le 16 janvier 2014] L’audience a été reportée au 6 mars prochain.