Ironie de l’histoire, c’est en pleine négociation de la COP21 que tous les occupants historiques de la ZAD (zone à défendre, ndlr) se retrouvent assignés en référé expulsion le 10 décembre 2015 à Nantes. AGO-Vinci demande l’expulsion sans délai des occupants historiques, protégés par l’accord politique de la grève de la faim de 2012 [1].
Au Liminbout, en ce matin ensoleillé du 5 décembre, l’huissier nous a remis notre assignation en référé soit 15 pages de documents auxquels se rajoutent la copie de notre jugement d’expropriation et quelques pièces annexes, et ce multiplié par le nombre de dossiers (un pour la maison, un pour les terres, un pour la ferme…). La lecture de ces documents nous informe que AGO-Vinci demande l’expulsion immédiate et sans délai comme le prévoit :
– le droit relatif au code de l’expropriation (pas de délai légal de 2 mois, pas de sursis à l’exécution, pas de trêve hivernal, pas de délai de grâce…). « Et pour cause, le Conseil Constitutionnel a reconnu l’utilité publique du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes, projet destiné à pallier à la saturation de l’aéroport de Nantes-Atlantique et à éviter le survol de la ville de Nantes, projet qui ne peut être ralenti » ;
– le principe d’équité : « les expropriés ont obtenu une somme tout à fait satisfaisante ». En effet, le juge d’expropriation a condamné AGO-Vinci à indemniser plus que son offre initiale. Cela veut donc dire que « le juge d’expropriation a prévu toutes les conditions nécessaires et utiles au rétablissement rapide de Mme Sylvie Thebault de manière à ce qu’elle ne ralentisse pas la prise de possession de l’expropriant. » (un chèque et je suis rétablie ! Dois-je dire « merci Vinci » ?).
« AGO-Vinci a donc l’honneur de demander à la juridiction de l’expropriation » :
– d’ordonner l’expulsion immédiate et sans délai, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; (cette somme est à multiplier par le nombre de dossiers, quatre en ce qui nous concerne) ;
– d’autoriser AGO à faire procéder à cette expulsion au besoin avec le concours de la force publique et d’un serrurier » (il y a État d’urgence !!!) ;
– « d’ordonner l’enlèvement et la séquestration de tous les meubles, animaux, matériels entreposés sur les parcelles aux frais , risques et périls des occupants ».
Quand on vous dit Vinci… Leur pub devrait être complétée. En effet, leurs constructions ne sont pas que de béton et d’acier. Elles peuvent être de sang, de larmes, de destruction de zones humides et d’espèces protégées, de saccage de l’environnement…
Mais de quoi se plaint-on ? Vinci prend soin de nos vies.
Joyeux Noël avec Vinci !
Sylvie Thébault, paysanne à Notre-Dame-des-Landes
Ce témoignage a initialement été publié sur le blog Paroles de Campagnes
Crédit photo : Jean de Peña / Collectif à-vif(s)