Côté face, la représentation nationale est plus jeune, plus féminisée, et davantage renouvelée avec 424 primo-députés sur 577. La nouvelle assemblée compte 223 femmes (contre 155 en 2012). La moyenne d’âge des députés diminue de sept ans (48 ans contre 55 ans). Les deux nouveaux mouvements qui entrent au Palais Bourbon – La République en marche (LREM, 308 sièges) et La France insoumise (17 sièges) – contribuent davantage à sa féminisation et à son rajeunissement que les partis traditionnels : moins de 25 % de femmes pour le FN (8 sièges), LR (113 sièges), le PCF (10 sièges) et l’UDI (17 sièges), une moyenne d’âge supérieure à 54 ans pour le PS (33 sièges), le PCF et l’UDI.
Côté pile, l’Assemblée, et en premier lieu sa majorité, bénéficient d’une légitimité très relative. Seulement quatre électeurs sur dix ont participé à ce second tour des législatives, avec une abstention record de 57 % à laquelle s’ajoutent deux millions de bulletins blancs et nuls. Une abstention qui concerne davantage les jeunes : les trois-quarts des 18-24 ans et 70 % des 25-34 ans n’ont pas été votés, selon l’étude réalisée par Ipsos. Rajeunie et féminisée, l’Assemblée nationale ne s’est pas diversifiée socialement. Environ la moitié des députés sont cadres ou issus de professions libérales, alors que ces catégories ne constituent que 18 % de la population active française. A l’inverse, l’Assemblée compte à peine 10 % d’employés et aucun ouvrier : la moitié de la France laborieuse n’est que très faiblement représentée. Ce déséquilibre n’est pas nouveau mais se renforce du fait du mode de sélection des candidats LREM, dont près de 70 % des candidats étaient issus des classes supérieures (lire ici).
La faible légitimité et la « fermeture sociale » de la nouvelle majorité pèseront lourd dans les mois qui viennent, en particulier pour les trois chantiers majeurs annoncés par le gouvernement : remise en cause du droit du travail, réforme de l’assurance-chômage et de l’assurance-vieillesse (retraites). Au vu de sa composition et de sa méconnaissance des autres réalités sociales, la majorité risque de ne pas comprendre les points de vue exprimés par les travailleurs et les syndicats lorsque les discussions concrètes s’ouvriront. Et de leur être fortement hostile. Arguant des exemples de « réussite individuelle » en son sein, elle risque également de considérer les chômeurs et les retraités modestes comme des assistés, principaux responsables de leur sort.
Autre défi majeur : l’écologie. Si les générations de députés moins âgés sont, a priori, plus naturellement favorables aux questions écologiques, l’agenda du gouvernement en la matière demeure totalement flou. Des politiques écologiques et climatiques qui se refuseraient à encadrer l’activité des entreprises en la matière au prétexte de leur compétitivité, ne seront d’aucun effet. Dans ce contexte, les élus incarnant une gauche sociale et écologiste – celles et ceux de La France insoumise, du PCF et les députés socialistes qui se révèleront offensifs sur le sujet – seront d’un précieux soutien pour les mouvements sociaux et les actions de la société civile qui ne manqueront pas d’émerger.
Ivan du Roy
Source de la carte : IDIX
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