Les lecteurs découvriront dans ce « véritable bilan annuel » que les grandes entreprises françaises redistribuent les deux tiers de leurs bénéfices aux actionnaires, que seulement 26 % de leurs employés sont en France et qu’elles y ont diminué leurs effectifs de 20% depuis 2010 malgré un chiffre d’affaires en croissance ; Ils apprendront qu’elles possèdent chacune des centaines de filiales partout dans le monde, dont 15% dans des paradis fiscaux, qu’elles dépensent des millions d’euros en lobbying à Paris, Bruxelles et Washington, et des milliards en publicité. Ils s’interrogeront sur le fait que le premier actionnaire du CAC40 n’est plus l’État français, mais la famille du milliardaire Bernard Arnault, PDG de LVMH et actionnaire de Carrefour, ainsi que sur la proportion des dirigeants issus de la haute fonction publique, à la tête de près de la moitié des sociétés cotées au CAC40.
Ce « véritable bilan annuel » revient aussi sur le rôle des multinationales françaises dans l’actualité nationale et internationale, depuis l’élection de Donald Trump aux États-Unis jusqu’à la réforme du code du travail en France. Il emmène également le lecteur près de chez lui, où se font sentir les conséquences des fermetures d’usines et l’héritage de la pollution, aussi bien qu’à l’autre bout du monde, dans l’Arctique russe où des groupes français extraient du gaz naturel, dans les forêts d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud qui souffrent de l’expansion des plantations de soja ou d’huile de palme, dans les banlieues des grandes villes asiatiques où triment les ouvriers et ouvrières de leurs fournisseurs, et jusque dans les océans envahis par le plastique.
Grand écart entre les discours et les pratiques
S’il est un fil conducteur à ce « véritable bilan annuel », c’est bien celui du grand écart entre la communication des grandes entreprises françaises et la réalité des faits et des pratiques. Les groupes du CAC40 rivalisent d’éloquence pour évoquer leurs engagements pour le climat,. Pourtant, seule une minorité d’entre eux (14) réduisent effectivement leurs émissions de gaz à effet de serre. Ils se vantent d’avoir 40% de femmes dans leurs conseils d’administration, sans préciser que la législation les y contraint ni que dans leurs comités de direction, non couverts par la loi, la proportion de femmes descend à 13%.
Le constat vaut aussi pour des multinationales françaises qui consacrent une énergie folle à se présenter elles-mêmes comme des modèles de vertu et de responsabilité sociale et environnementale, à l’image de Danone. Si l’on regarde la réalité des chiffres et des faits, Danone se situe dans la moyenne en terme de redistribution de ses profits aux actionnaires. Elle fait partie des multinationales tricolores qui possèdent la plus grosse proportion de filiales dans les paradis fiscaux. En terme de rémunérations, elle est l’un des groupes les plus inégalitaires du CAC40. Son effectif en France a chuté de 9% depuis 2010 alors même que son chiffre d’affaires augmentait de 45%.
Danone contribue à l’envahissement du monde et des océans par le plastique, n’apportant que des réponses partielles et imparfaites en matière de recyclage. Le groupe agro-alimentaire a réduit ses émissions de gaz à effet de serre et affiche des objectifs ambitieux dans ce domaine, mais l’industrie laitière reste l’une des principales sources mondiales de gaz à effet de serre.
Menaces sur le droit à l’information
Le « véritable bilan annuel des grandes entreprises françaises » montre l’importance d’une information indépendante et d’un débat contradictoire et éclairé sur ces questions, pour notre démocratie et notre planète, mais aussi pour les entreprises elles-mêmes et leurs salariés.
Malheureusement, avec la loi sur le secret des affaires, la concentration des médias entre les mains de quelques milliardaires, la multiplication des procédures bâillon contre les journalistes, les associations et les lanceurs d’alerte, ou encore la réduction des prérogatives des représentants des salariés, le droit à l’information et au débat sur les entreprises et leur stratégie semble plus menacé que jamais.
Ce « véritable bilan annuel » est donc un projet ambitieux, mais ô combien nécessaire. Si nous avons pu le mener à bien, ainsi que le travail d’enquête et de veille indépendantes qui est le nôtre tout au long de l’année, c’est grâce au soutien financier de nos lecteurs. C’est pourquoi nous vous invitons à soutenir l’Observatoire des multinationales. Et de nous permettre de continuer sur cette lancée, à faire encore plus et mieux en matière d’information d’utilité sociale.
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Nous avons publié au cours des semaines écoulées plusieurs articles et enquêtes extraits de cette publication. En voici la liste (par ordre chronologique inverse) :
– Comment l’État actionnaire est vidé peu à peu de sa substance
– Les folles dépenses publicitaires du CAC40
– Les patrons du CAC40 ont gagné en moyenne 4,68 millions d’euros en 2017
– Le CAC40 en a-t-il vraiment fini avec le charbon ?
– Le CAC40 en 2017 : plus de 16 000 filiales, dont 15% dans des paradis fiscaux
– Dans les entreprises du CAC 40, le pouvoir reste aux mains des hommes
– LVMH, Kering, Hermès, Chanel : pas de « ruissellement » pour les profits record du luxe français
– Dividendes : les actionnaires ont coûté 55 milliards au CAC40 en 2017