Santé au travail

Amiante : après 2 ans de procédures, la Justice donne raison à un inspecteur du travail

Santé au travail

par Nolwenn Weiler

Les inspecteurs du travail ont encore un peu de pouvoir, il suffit juste d’être patient... Après deux ans de procédures, la Cour de cassation vient de donner raison à un inspecteur du travail qui avait exigé le retrait de salariés d’un atelier contaminé par l’amiante. Interdite d’utilisation depuis 1997, la fibre tueuse est encore présente dans de nombreux édifices. Le début de l’affaire remonte au mois d’octobre 2011. Nous sommes à Aubevoye (Haute-Normandie) dans l’un des ateliers de la société Draka Paricable, spécialisée dans la production de câbles électriques et filiale du groupe italien Prysmian. Un salarié retire les joints d’un four sans qu’aucun diagnostic de risque amiante n’ait été fait. Or, la probabilité que ces joints soient constitués de fibre d’amiante (qui résiste très bien à la chaleur) est très forte.

Informé par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), l’inspecteur du travail se déplace immédiatement. Et exige que tous les salariés de l’atelier concerné soient évacués, compte tenu du risque important de dissémination de poussières d’amiante dans l’atmosphère. La direction s’exécute. Mais trois jours plus tard, l’atelier reprend son activité. Selon la direction, les prélèvements de particules seraient négatifs. Mais l’inspecteur du travail critique la manière dont ces prélèvements ont été réalisés. Et le CHSCT s’oppose au redémarrage de l’atelier, en raison des risques persistants d’inhalation de fibres d’amiante. Quelques jours plus tard, le juge des référés confirme l’avis de l’inspecteur et ordonne le retrait des salariés de l’atelier.

La société Paricable fait de nouveau appel de la décision. Mais la Cour confirme la décision prise par le juge des référés. L’atelier doit être décontaminé avant que les salariés ne reprennent le travail. L’entreprise se pourvoit alors en cassation. Et le 22 novembre dernier, ce pourvoi est rejeté. Pour la Justice, la simple présence de fibres présente « en soi » un danger pour les salariés, quelle que soit la quantité. Voilà les employeurs rappelés à leurs obligations en matière de sécurité, notamment dans le dossier amiante. « Le risque amiante reste sous-estimé », souligne l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Les maladies liées à la fibre mortelle représentent, encore aujourd’hui, la deuxième cause de maladies professionnelles et la première cause de décès liés au travail (hors accidents du travail). Mais certaines entreprises préfèrent consacrer leur énergie en procédures judiciaires plutôt qu’en mesure de prévention de leurs salariés.