Un verdict inédit vient d’être rendu le 22 septembre par le tribunal des Affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc : deux salariés intoxiqués aux pesticides vont être indemnisés à hauteur de 110 000 euros chacun par leur ancien employeur. « C’est la première fois en France qu’un tribunal indemnise des salariés victimes des pesticides atteints d’hyper sensibilité aux produits chimiques multiples », salue l’organisation syndicale Solidaires. « Cette décision est une nouvelle victoire pour Stéphane et Laurent qui mènent depuis maintenant près de sept ans un combat sans relâche pour faire reconnaître leur maladie, exiger réparation et dénoncer le scandale sanitaire et environnemental que représente aujourd’hui l’utilisation massive et irresponsable des pesticides dans l’industrie agroalimentaire » [1].
Laurent Guillou et Stéphane Rouxel ont travaillé pour une plate-forme de transit de produits phytosanitaires, appartenant au géant breton de l’agro-alimentaire Triskalia. Fin 2009, pour arrêter le pourrissement des céréales dans les silos, l’entreprise décide de traiter les stocks en déversant des milliers de litres de pesticides. Parmi eux, le Nuvan Total, un neurotoxique cancérigène bourré de composants hautement toxiques utilisé pour la conservation des céréales. Basta! vous a relaté cette affaire. À de nombreuses reprises, des salariés vont être placés en arrêt maladie. Certains d’entre eux entament alors un long combat judiciaire devant les tribunaux afin de faire reconnaître leur préjudice et obtenir réparation (notre article : Intoxication aux pesticides : l’interminable combat des ex-salariés d’un géant français de l’agroalimentaire).
Pour l’association Phyto-Victimes [2], « cette victoire démontre qu’il est aujourd’hui possible pour les professionnels victimes des pesticides d’être reconnus et d’obtenir réparation mais elle est aussi le reflet du parcours du combattant auquel sont confrontées les victimes, car engager une procédure peut s’avérer long, complexe et coûteux pour une victime souffrant de la maladie et parfois de précarité (licenciement, réduction de l’activité sur l’exploitation…) ». Le combat n’est pas terminé pour Laurent Guillou et Stéphane Rouxel, une plainte au pénal étant toujours en cours d’instruction.