Le greenwashing signifie littéralement « laver en vert ». Il désigne un procédé marketing exagérant les propriétés environnementales d’un produit ou d’une action menée par rapport à la réalité. Pour faire court : c’est parler d’environnement plus qu’on en fait vraiment. Certaines publicités jouent un rôle important dans le maintien d’une offre et d’une demande de produits et de services polluants par la transmission de certaines valeurs non compatibles avec l’urgence écologique, voire par la transmission de messages mensongers. Des associations de défense des consommateurs et de l’environnement s’emploient à dénoncer auprès des instances de régulation de la profession les communications mensongères ou trompeuses qui ne font souvent que camoufler le peu d’efforts consentis par beaucoup d’entreprises au regard des enjeux écologiques actuels.
Le greenwashing, ou éco-blanchiment en français, entraîne plusieurs conséquences :
– Des consommateurs bien intentionnés trompés dans des achats qui ne reflètent pas la promesse environnementale exprimée dans les messages publicitaires ;
– Les produits qui offrent de meilleurs bénéfices environnementaux sont éloignés du marché et la pénétration de réelles innovations est ralentie ;
– Il pérennise des attitudes de cynisme et de doute à l’égard des promesses environnementale ;
– Il affaiblit les efforts importants de sensibilisation à l’environnement par les associations et par les pouvoirs publics.
Le secteur automobile, bon premier en termes de dépenses publicitaires, est remarquable dans le domaine.Les agences de communication et de publicité, en accord avec leurs clients annonceurs, associent l’achat de la voiture à un geste de préservation de l’environnement mais les cas de mensonges publicitaires « verts » sont courants dans tous les domaines. Voici deux exemples avérés de greenwashing :
Syngenta DEFI© : un désherbant pour le meilleur... et pour le pire
La question de l’innocuité des pesticides est devenue préoccupante pour l’opinion publique. Les leaders du marché ont donc adopté une attitude plus prudente et discrète dans leur communication dédiée au grand public. Le projet de loi Grenelle 2 vise, dans l’article 40, à limiter l’utilisation des produits phytopharmaceutiques par les particuliers, en interdisant la publicité pour la vente de phytosanitaires à destination des jardiniers amateurs. Cette proposition n’entrave pas la communication destinée aux professionnels. Mais l’Union des entreprises pour la protection des jardins et des espaces verts (UPJ), dans un communiqué de presse daté du 25 juin 2009 conteste l’article 40 du projet de loi Grenelle 2 et recommande de pouvoir s’autoréguler, grâce à une charte UPJ renforcée sous le contrôle de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP).
Dans la publicité ci-contre, Syngenta fait la promotion de DEFI© un herbicide destiné à éliminer les adventices ou mauvaises herbes dès l’automne. L’idée principale est d’identifier l’utilisation de l’herbicide à la fois à un gain d’argent et à la “durabilité environnementale”. Ce qui est loin d’être démontré. Pour information, le classement de la formule du DEFI© est N, dangereux pour l’environnement, XI, irritant.
« Durable » renvoie implicitement à développement durable. En l’occurrence, la compatibilité des pesticides avec le respect de l’environnement est nettement contestable. À long terme, est-on réellement sûr que les rendements seront maintenus ? Surtout si l’état des sols est affecté et dégradé par l’utilisation répétée d’intrants chimiques. À la lecture de la fiche de données de sécurité, on apprend que le produit est dangereux mais aussi persistant. Ainsi, il y a bioaccumulation dans le cas du prosulfocarbe (800 grammes par litre de produit), que sa dégradation par période de demi-vie est de 159 – 279 jours (c’est-à-dire qu’au bout de ce temps, il restera la moitié de la dose) et que le prosulfocarbe est persistant dans l’eau. En effet, le DEFI© est relativement permanent mais peut-être pas pour le meilleur. Cette publicité aurait dû faire l’objet de modifications. Elle ne respecte pas les articles 2-1, 2-2, 2-9 et 2-12 de la Recommandation arguments écologiques de l’ARPP d’octobre 1998.
Herta : « 100% (anti ?) naturel »
La publicité pour cette gamme de produits Herta, en utilisant l’accroche « 100% naturel » est trompeuse et caractérise deux grands travers de l’éco-blanchiment : être flou et imprécis, être tout simplement mensonger. Cette qualification ne signifie pas que le jambon est issu de l’agriculture biologique, mais signifie seulement que le jambon n’est pas 100% artificiel. D’ailleurs, en disant cela, le présupposé peut nous amener à croire que le jambon n’était pas 100% naturel. Cette appellation renvoie à l’univers de la santé. Seulement, naturel n’est pas synonyme de sain. Le plomb et l’uranium sont des éléments issus de la nature.
Le caractère rural est représenté dans la version télé par le décor qui exprime l’authenticité. Il est recomposé à partir d’aliments. Une prairie en tranches de jambon, des arbres en persil, des fagots de bois en cornichon et des bottes de paille en beurre. Ce décor transmet l’idée d’un monde d’abondance. Le ciel bleu, les oiseaux qui chantent et le jingle bien connu qui nous rappelle l’identité de la marque intensifient l’ambiance de campagne qui doit caractériser l’état d’esprit d’Herta et, par extension, les origines du porc. Ceci est une contrevérité. Les porcs de cette gamme ne gambadent pas dans les prairies. Les élevages dits « hors-sol », qui représentent plus de 90% des élevages de porcs français sont réalisés dans des bâtiments, sur caillebotis. Les porcs ne sont pas nourris avec des céréales issues d’un processus naturel comme le bio (donc sans ajout de produits phytosanitaires) et Nestlé (propriétaire de la marque, ndlr) ne veut pas dire si le soja de l’alimentation porcine n’est pas OGM, laissant ainsi planer le doute.
Le 100% naturel est inséré dans un visuel qui représente un tampon. Il représente l’engagement d’Herta pour la qualité de ses produits. Le tampon certifie. Mais quoi ? Il est en fait un effet visuel qui auto valide un cahier des charges que l’entreprise Herta a elle-même réalisé et dont le contenu est loin d’apporter les éléments nécessaires à étayer l’allégation « 100% naturel ». Cette publicité aurait du faire l’objet de modifications. Elle ne respecte pas les articles 2.1, 2.2, 2.6, 2.7, 2.9, 2.11 et 2.12 de la Recommandation arguments écologiques de l’ARPP d’octobre 1998. Pour l’heure Herta continue de jouer sur la confusion et les raccourcis.
Article réalisé par l’Observatoire indépendant de la publicité, extrait du livre « Lobby Planet Paris, ces mains invisibles qui guident les politiques… », édité par l’Association internationale de techniciens, experts et chercheurs (Aitec), 100 pages, 5 euros.
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