Les macronistes pouvaient encore se prévaloir d’une relative embellie statistique en matière de baisse du chômage. Ce temps semble révolu. Les annonces de plans « sociaux » se multiplient : plus de 2300 emplois supprimés chez Auchan, plus de 1200 chez Michelin à Vannes et Cholet, près de 600 à Téléperformance (centres d’appels), près de 200 à Vencorex en Isère (une entreprise spécialisée dans les isocyanates utilisés dans les peintures et vernis pour les secteurs de l’automobile ou de l’électronique), plus d’une centaine à ArcelorMittal à Reims et Denain, idem dans un site de Stellantis (ex-Peugeot) à Strasbourg… À ce jour, la CGT décompte près de 200 plans de licenciements, qui pourraient concerner jusqu’à 150 000 emplois, selon sa secrétaire générale Sophie Binet.
« Carlos Tavares nous délocalise sans scrupule. Le PDG de Stellantis a annoncé qu’il allait recourir à des sous-traitants installés dans des pays à bas coût, en Europe de l’Est ou dans les pays du Maghreb. Si Carlos Tavares a décidé de ne plus nous donner de travail, alors Stellantis doit s’asseoir à la table des négociations pour indemniser nos salariés », dit Bachir Himmi, délégué syndical FO de Stellantis à Rue 89 Strasbourg. À l’appel de tous les syndicats de l’entreprise (FO, CGT et CFTC), les 122 salariés de l’usine se sont mis en grève.
« Ils n’ont même pas eu le courage de venir nous le dire eux-mêmes »
« Ils n’ont même pas eu le courage de venir nous le dire eux-mêmes, on était parqués dans une salle, et, après l’annonce, ils nous ont dit de rentrer chez nous », soupirent Cécile et Nelly, salariées de Michelin à Cholet, relaie L’Humanité. « Ce sont des choix ! C’est inadmissible de voir que le groupe fait 3,5 milliards de bénéfices et qu’on ferme des usines. Les profits doivent servir à maintenir les emplois. Il faut imposer l’interdiction des licenciements », lance Dominique, devant le siège de la multinationale à Clermont-Ferrand.
L’inquiétude des salariés peut être d’autant plus grande, que la réforme de l’assurance chômage continue de se poursuivre à bas bruit. « À compter du 1er janvier 2025, les chômeurs âgés de 53 à 55 ans n’auront plus une durée d’indemnisation maximale rallongée du fait des difficultés à retrouver du travail après 50 ans. Pour elles et eux, ce sera 18 mois, comme l’ensemble des chômeurs, au lieu de 22,5 mois précédemment », rappelle Rapports de force.
« Le macronisme est en faillite », estime le député insoumis Matthias Tavel (Loire-Atlantique). La gauche « tente de renouer avec l’électorat ouvrier », analyse Mediapart. Mais comment agir face aux fermetures de sites ? « Si les socialistes s’apprêtent à présenter des pistes sur le sujet cette semaine à l’Assemblée nationale, Aurélie Trouvé [députée LFI] prépare quant à elle un plan de sortie de crise dédié au secteur automobile qu’elle détaillera avant les vacances de Noël. En parallèle, le groupe insoumis réclame la mise en place d’une commission d’enquête au Palais-Bourbon sur l’utilisation de l’argent public par Michelin », écrit la journaliste Pauline Graulle.
Les élus du Nouveau Front populaire vont devoir faire preuve de volontarisme et d’imagination pour dépasser les incantations faciles à la réindustrialisation, et véritablement ouvrir des perspectives. « Pas question de regarder les plans de licenciements comme les vaches regardent passer les trains », assure Matthias Tavel. D’autant que même les trains (de marchandises) risquent de ne plus passer. La CGT appelle en tout cas à une journée de mobilisation sur l’emploi le 12 décembre prochain.
Ivan du Roy
Photo : © Eros Sana
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