Le tribunal de grande instance de Paris vient de déclarer illégal le remplacement de grévistes par des travailleurs intérimaires, à La Poste, fin 2015 à Thuir, dans les Pyrénées-Orientales. Dans son jugement du 6 septembre, le tribunal a condamné l’entreprise à verser 6000 euros de dommages et intérêts au syndicat Sud Poste 66, qui avait lancé la procédure.
« Cette décision démontre que l’opiniâtreté du syndicat Sud à défendre le droit de grève s’est révélée fondée, réagit le syndicat. La Poste, dans ce conflit, n’a pas hésité à enfreindre la loi et à bafouer le droit constitutionnel de grève pour éviter de répondre aux légitimes revendications des grévistes. Le Code du travail stipule qu’« il est interdit de recourir au travail temporaire pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un conflit collectif de travail ». Les postiers de Thuir s’étaient mis en grève pendant trois mois en 2015 contre leurs conditions de travail et le manque de personnels sur leur site.
Déjà en janvier, l’inspection du travail de Perpignan avait jugé illégal le recours à des personnels intérimaires pour remplacer des grévistes dans un site de tri voisin, à Rivesaltes. Là, le conflit avec la direction de la Poste a duré sept mois, un rapport de force entre direction et employés qui n’a pas été vain. La Poste a finalement accepté la création d’une tournée supplémentaire de distribution du courrier, et intégré une personne jusque-là en CDD. À Asnières, dans les Hauts-de-Seine, les postiers ont obtenu l’annulation de la réorganisation qui prévoyait onze suppressions d’emploi.
Les réorganisations en série des sites de tri et la dégradation des conditions de travail qui s’en suivent sont régulièrement dénoncées par les postiers. Elles ont parfois des conséquences tragiques. Fin août, la famille d’un facteur du Doubs signale que celui-ci s’est suicidé en juillet en laissant derrière lui une lettre dans laquelle il accuse ses conditions de travail et La Poste qui « détruit ses employés ». Il y a quelques jours, une jeune factrice (en CDD) de 25 ans révèle comment sa direction lui a refusé pendant plusieurs heures une prise en charge médicale, alors même qu’elle était en train de faire un accident vasculaire cérébral. Elle a déposé plainte contre ses supérieurs pour non assistance à personne en danger.
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