En 2014, la Russie envahit la Crimée et le Donbass. En 2022, le pays de Poutine lance une invasion à grande échelle de l’Ukraine. L’émotion internationale est forte, tous les yeux se tournent vers ce pays voisin de l’Union européenne, frontalier de la Pologne, de la Slovaquie, de la Hongrie et de la Roumanie. Aujourd’hui l’attention internationale faiblit, et le soutien de certains pays – dont les États-Unis – se fait plus incertain. Mais la guerre russe continue en Ukraine. Les frappes de drones et de missiles blessent et tuent toujours, jusque dans la capitale. Dans les territoires occupés par l’armée russe, des personnes sont enlevées et torturées hors des radars.
Oleksandra Romantsova est directrice exécutive du Centre pour les libertés civiles, une ONG ukrainienne créée en 2007 pour promouvoir les droits humains. Depuis le début de la guerre, l’organisation s’attelle à consigner les crimes de guerre, pour s’assurer que justice soit faite. Leur travail a été récompensé par un prix Nobel de la paix en 2022.
Parmi ses nombreux projets en cours, la campagne « People First » porte un appel à libérer les prisonniers – civils, militaires, enfants et prisonniers politiques – et à mettre la vie de ces personnes au cœur des négociations internationales. C’est avec ce prisme qu’Olexandra Romantsova, de passage à Paris, analyse la situation dans son pays et à l’international.
Basta! : Le Centre pour les libertés civiles est basé à Kyiv. Comment se déroule la vie là-bas en ce moment ?
Oleksandra Romantsova : On vit au rythme des alertes et des missiles. C’est une situation vraiment inconfortable, stressante. On est constamment en colère parce qu’on ne dort pas depuis trois ans. Mais cela ne veut pas dire qu’on ne doit pas continuer notre travail. Le prix Nobel de la paix nous a donné la possibilité d’avoir une voix qui porte plus loin. On a beaucoup à faire.
On travaille non seulement à documenter les crimes de guerre, mais aussi au sein de l’Ukraine, où on pousse à des réformes pour pouvoir rejoindre l’Union européenne. C’est notre objectif principal. Pour cela, nous devons moderniser notre législation et y incorporer les standards européens en termes de droits humains. C’est un travail pour les décennies à venir. Dans les années à venir, nous devrons avoir des discussions proactives sur les unions entre personnes du même genre par exemple.
Comment l’intensification des attaques russes de ces dernières semaines est-elle perçue par la population ? Y a-t-il toujours autant de peur qu’en 2022 ?
Au départ, beaucoup de gens ont voulu fuir et ont quitté l’Ukraine. Aujourd’hui, pour ceux qui restent, ce n’est plus de la peur que l’on ressent, mais de la colère. Et nous sommes entourés de héros. Ceux qui partent sur le front sont des gens ordinaires : des profs, des journalistes, des danseurs classiques… Désormais, dans l’armée, toutes les strates de la société sont représentées. Et puis, il y a les héros restés à l’arrière, les pompiers par exemple.
Ce sont les premiers à se rendre sur le lieu d’un bombardement, lorsqu’un incendie se déclenche. Or, la Russie frappe souvent une nouvelle fois une vingtaine de minutes après le premier bombardement, justement pour tuer ces sauveteurs. Il y a aussi le personnel médical, qui continue son travail dans n’importe quelles conditions, même si l’électricité est coupée dans l’hôpital. Et puis, il y a ceux qu’on oublie, les personnes qui réparent. On ne pense jamais à ces personnes, celles qui œuvrent pour réparer vos canalisations ou rétablir l’électricité – mais en Ukraine, ce sont des héros. C’est la vie héroïque de tous les jours.
Il semble que la volonté des gens ne se brise pas malgré les difficultés de la guerre…
On n’a pas le choix. On sait ce qui nous attend si la Russie nous envahit. Nous le voyons depuis des années dans les territoires occupés du Donbass et de la Crimée. Lorsque la Russie arrive, cela signifie que vous n’avez aucun droit, aucune loi, aucun commerce équitable, aucune liberté d’expression... Ce n’est pas ainsi que les Ukrainiens veulent vivre. Nous savons que l’Ukraine sera détruite, que la société ukrainienne, sa démocratie, son État de droit, ses droits de l’homme seront détruits. C’est ce que nous constatons dans la société russe.
La guerre contre les Ukrainiens n’est que le résultat de toutes les guerres précédentes en Moldavie, en Tchétchénie, en Géorgie, en Syrie... Tout cela parce que les droits de l’homme ont été bafoués au cours des 25 dernières années. L’Ukraine jouit aujourd’hui de libertés et des droits humains, même si ce n’est pas parfait. Si un dirigeant ukrainien avait décidé, il y a dix ans, d’envahir un autre pays, la société civile se serait soulevée, aurait refusé cela. En Russie, c’est impossible. Les personnes qui tentent d’élever la voix sont emprisonnées. C’est pourquoi notre campagne, « People first » [Les personnes d’abord, ndlr], inclut les prisonniers politiques en Russie et en Biélorussie. Il s’agit de personnes qui tentent de s’opposer à l’agression russe et bélarusse contre l’Ukraine.
Dans le cadre des négociations, les pays discutent de questions militaires, économiques, de sanctions, de tout sauf des personnes. C’est pourquoi nous nous concentrons sur les civils détenus illégalement. Ils enlèvent des Ukrainiens et les emmènent dans les prisons russes où ils les gardent au secret sans aucune accusation. Nous ne savons pas où ils sont, nous ne savons pas dans quel état ils sont, et cela concerne au moins 7000 personnes. Il en va de même pour les prisonniers de guerre, car la Russie ne reconnaît pas qu’ils viennent de la guerre, de sorte qu’ils ne bénéficient pas du statut et de la protection qui y est liée.
Comment se passe la vie dans les territoires occupés ?
Imaginez le pire et le plus criminel des quartiers de votre ville, mais sans aucune règle et où les policiers ne peuvent pas venir. C’est ainsi que les gens vivent dans les territoires occupés. Vous pouvez être un enseignant, un journaliste, un bénévole, un dirigeant d’une communauté locale, ils peuvent vous arrêter et vous torturer. L’occupation est un lieu sans règles.
Parfois, les gens disent « oh mais même ici, à Paris, dans la rue, c’est un endroit sans règles ». C’est faux, il y a beaucoup de règles ici qui sont faites pour assurer votre sécurité – vous savez que la police existe, vous savez que le code de la route existe, vous savez que les gens ne peuvent pas faire ce qu’ils veulent parce qu’il y a des règles. Il y a un ordre pour les maintenir, et cet ordre s’appelle la démocratie. Je sais que chaque système a un grand nombre de problèmes, mais ils ont le mérite d’exister, et vous pouvez réparer les systèmes, vous pouvez avoir une représentation politique. Là, elle n’existe pas du tout. La seule règle, elle est faite par les armes.
Il y a récemment, au début du mois de juillet, eu un large échange de prisonniers entre l’Ukraine et la Russie. Comment cela se passe-t-il ?
Ces échanges de prisonniers continuent à l’heure actuelle. Nous ne pouvons pas donner de chiffres pour l’instant, mais nous espérons qu’ils seront bons. Je ne suis pas directement impliquée dans le processus, mais au Centre pour les libertés civiles, nous faisons le lien avec les familles des personnes libérées et les invitons à venir à leur arrivée.
Si vous regardez les vidéos de ces arrivées de prisonniers, vous distinguerez trois catégories de personnes : les personnes qui sortent du bus – elles ont mauvaise mine, mais elles sont heureuses, enroulées dans des drapeaux ukrainiens... Puis, il y a leurs proches. On voit les femmes, les enfants... On ne voit pas toutes leurs familles ; on ne voit que ceux qui ont reçu la confirmation de l’organe spécial de l’État qui coordonne ces échanges.
On ne sait pas toujours qui va être ramené, il reste des incertitudes jusqu’au dernier moment. Le troisième groupe de personnes, vous pouvez les voir avec un drapeau sur lequel est imprimée l’image d’une personne ou avec une photo dans les mains : ce sont les proches des personnes qui ont le statut de « personne disparue » et dont la Russie ne confirme pas si elles sont en captivité. Ainsi, lorsque toutes ces personnes sortent de prison, les proches des personnes disparues sont là pour les interpeller et leur demander s’ils ont vu leurs proches lorsqu’ils étaient enfermés.
Il faut savoir que les personnes échangées qui reviennent ne sont jamais des civils. Il ne s’agit que de prisonniers de guerre. La dernière fois, lors de l’échange de 1000 personnes, ils nous ont amené de soi-disant « civils », mais il ne s’agissait pas de civils kidnappés sous l’occupation. Il s’agissait de prisonniers qui étaient restés en prison dans les territoires occupés et qui sont des citoyens ukrainiens.
Ils étaient en prison, leur peine était terminée et, normalement, la Russie aurait dû les ramener en Ukraine. La Russie ne le fait pas, elle se contente généralement de les déposer à la frontière géorgienne – parfois sans documents, sans argent, et ils doivent trouver leur chemin vers l’Ukraine d’une manière ou d’une autre. Lors de l’échange, ils ont envoyé 120 personnes de ce groupe et ont dit « ce sont des civils ».
Comment se passent les négociations avec la Russie ?
La Russie ne fait jamais exactement ce qu’elle a promis, jamais. Lorsqu’elle nous a dit : « D’accord, nous vous renvoyons 6000 corps de soldats ukrainiens », nous avons analysé ces corps (l’analyse n’est pas encore terminée) et nous avons réalisé que la moitié d’entre eux n’étaient pas des Ukrainiens, mais des Russes. L’un d’entre eux était même d’origine Russe et avait la nationalité australienne, et ils nous l’ont envoyé. La Russie ne dispose pas d’un système de reconnaissance des corps par l’ADN. Ils ont un centre à Rostov-sur-le-Don, mais il est bloqué, c’est comme un embouteillage. Ainsi, lorsque nous demandons les corps, ils ne nous donnent pas seulement des corps ukrainiens. Ils ne se soucient absolument pas de leurs propres citoyens.
Lors de votre interview pour le site du prix Nobel, vous avez déclaré que « les droits de l’Homme sont comme un niveau d’eau – s’il tombe à un endroit, vous aurez un problème partout ». Pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire ?
Vous intéressez-vous à ce qui se passe au Bangladesh ? Au Sri Lanka ? Au Venezuela ? En Côte d’Ivoire ? Nous pensons que notre vie quotidienne n’est pas affectée par ce qui se passe ailleurs, chez des gens d’une autre culture, d’une autre langue, d’un autre État – quand ils en ont un. Mais s’il existe des exemples montrant que quelque chose est possible – par exemple, que des centaines de milliers de femmes en Afghanistan n’ont aucun droit, qu’elles doivent rester à la maison toute la journée –, cela peut se produire n’importe où.
Je pense que Poutine n’a pu exister que parce que Loukachenko [président du Bélarus depuis 1994] a existé pendant 30 ans en Europe. Et parce que Poutine peut exister, cela signifie que d’autres dictatures peuvent également exister, en disant : « J’ai du gaz ou du pétrole, vous avez besoin de mes ressources, alors je ferai ce que je veux. »
Il y a quelques semaines, Donald Trump a annoncé que les États-Unis cesseraient de livrer des armes à l’Ukraine. Une semaine plus tard, il a en fait dit que les livraisons continueront... Que pensez-vous de cette incertitude permanente ?
Trump a changé d’avis et je pense qu’il peut encore le faire demain. Il serait bon qu’il maintienne cette autorisation, car ces armes attendent à la frontière et nous pourrons peut-être les recevoir avant qu’il ne change d’avis.
Certains pourraient me dire : « Vous êtes une défenseure des droits de l’homme, pourquoi parlez-vous d’armes ? » Si vous me proposez d’autres moyens de nous défendre et que personne ne meurt pendant que vous en discutez, je serai tout à fait d’accord, apportez-moi cette solution. Nous renoncerons aux armes si on nous donne d’autres possibilités. Mais ces options n’existent pas. Nous avons besoin d’armes pour notre défense. Si nous n’avons pas de missiles, demain, au beau milieu de Kyiv, on sera détruits par des frappes. Et, comme vous le savez, il est très difficile de lutter pour les droits de l’homme quand on est mort.
L’Union européenne est-elle à la hauteur selon vous dans son soutien à l’Ukraine ?
L’UE, je l’espère, est notre future famille. Mais même si nous nous contentons de faire des réformes et d’entretenir une amitié étroite avec l’UE, ce serait une très bonne chose. Rejoindre l’UE, c’est notre vision de l’avenir, c’est ce pour quoi nous nous battons. C’est pourquoi l’une de nos craintes est que, pendant que nous nous battons pour y rentrer, un pays puisse perdre la démocratie à l’intérieur même de l’UE. Parfois, des personnes originaires de pays européens me demandent ce qu’elles peuvent faire pour nous aider. Je leur réponds : d’abord, préservez la démocratie dans votre pays, c’est important pour nous !
Une nouvelle salve de sanctions de l’UE contre la Russie a été annoncée, « la plus importante depuis 2022 », selon les déclarations. Les sanctions sont-elles efficaces, étant donné que celles mises en place depuis 2022 n’ont pas semblé arrêter l’invasion russe ?
Oui, si vous les surveillez et si vous observez la manière dont elles sont appliquées. Si l’on se contente de mettre en place des sanctions sans en assurer le suivi, cela explique pourquoi on ne voit pas les effets rapides des sanctions. Mais, aujourd’hui, nous voyons quelques résultats de la mise en œuvre des sanctions. La Russie a commencé à reconnaître officiellement qu’elle avait des problèmes économiques, ce qu’elle n’avait pas admis au début.
Comment les sociétés civiles européennes peuvent-elles se mobiliser et aider – à leur échelle – l’Ukraine ?
Il est très important de se rappeler que notre histoire n’est pas un simple blockbuster. Nous ne pouvons pas apporter de l’action chaque jour et que des choses qui vous intéressent et attrapent votre attention tous les jours. C’est une guerre. Chaque jour, il y a de la souffrance, des vies brisées, des tragédies sociales, mais cela ne veut pas dire que chaque jour quelque chose sera « intéressant » pour vous. Mais vous devez vous rappeler que, tant que nous ne serons pas en sécurité et n’aurons pas la capacité de nous défendre, vous n’aurez pas l’âme en paix.
Il est important de se rappeler que les droits de l’Homme, ce n’est pas seulement rendre un système agréable pour tout le monde. Il s’agit de prévenir la guerre. Les droits de l’Homme nous ont donné la possibilité de résister. En Russie, lorsque les droits de l’Homme ont cessé d’exister, on a commencé à utiliser les gens pour faire la guerre. En ce sens, les droits, cela partie de la prévention de la guerre.
Au Centre pour les libertés civiles, vous recueillez des preuves de crimes de guerre et d’autres violations des droits internationaux. Que se passe-t-il sur le terrain ? Et qui doit rendre des comptes ?
Notre base de données contient actuellement plus de 88 000 cas de crimes de guerre documentés. Le bureau du procureur général compte quant à lui plus de 160 000 cas. Et ce, seulement depuis le début de l’année 2022. Nous sommes également en train de créer un tribunal spécial contre le crime d’agression. Cet accord a été signé à Strasbourg entre le Conseil de l’Europe et l’Ukraine.
Le crime d’agression est intéressant : il s’agit d’examiner la décision politique et administrative de déclencher la guerre. Toutes les personnes qui y ont pris part – parlementaires, ministres, présidents, qu’ils soient encore en fonction ou non – peuvent être accusés. Il s’agit d’environ 20 à 30 personnes.
Nos collègues, défenseurs des droits de l’homme en Biélorussie, soulignent que Loukachenko devrait également être poursuivi. Parce que les Russes ont lancé des missiles depuis le territoire de la Biélorussie, que les deux pays ont coopéré à une structure pour kidnapper des civils et les torturer, que des enfants ukrainiens sont envoyés en Biélorussie dans des camps d’endoctrinement militaire soi-disant patriotiques...
C’est important de poursuivre ces personnes pour la justice historique, pour faire comprendre que de telles actions ne sont pas normales, qu’on ne peut pas agir de la sorte. Vous devez vous préoccuper de vos civils. En Russie, ils utilisent les gens pour leur volonté d’agression. Des milliers de Russes ont été tués sur la ligne de front pour cette seule ambition. Est-ce que cela protège les gens ? Cela leur apporte-t-il un peu de bien-être ? Est-ce que cela permet de mieux organiser cet immense pays ? Les gens vous élisent pour défendre leurs intérêts, et leur intérêt n’est pas de mourir au milieu de nulle part.
Ils brisent les gens mentalement. Ils leur font croire qu’ils ne sont responsables de rien – ni de leur vie, ni de leur État. Même des personnes intelligentes le disent. J’ai ici un ami qui a émigré, un réfugié politique de Russie, qui dit « je ne peux pas être responsable de cela », en parlant de la guerre. Désolé, mais si : c’est ainsi que fonctionnent les États et la démocratie. Si vous êtes un adulte et un citoyen de votre pays, vous en êtes responsable. Tout comme un adulte ukrainien est responsable de l’Ukraine.
Les pourparlers avec la Russie, tels que ceux qui ont eu lieu le 16 mai et le 2 juin, peuvent-ils aboutir ? Si non, comment sortir de la guerre ?
C’est une bonne question. Tout d’abord, il faut comprendre ce que la fin de la guerre signifie pour les Ukrainiens. Cela signifie que nous disposerons d’un système de défense capable d’empêcher tout autre pays de nous arrêter dans notre développement d’une société fondée sur l’État de droit et les normes en matière de droits humains.
Cela signifie que tous les citoyens ukrainiens sont protégés. S’ils sont citoyens de territoires occupés, ils doivent être protégés. Potentiellement, cela peut se faire avec la participation d’une mission de paix internationale, c’est une possibilité. Mais il faut que cela fonctionne, il ne peut s’agir de simples promesses.
Nous devons trouver un moyen d’arrêter l’agression, d’arrêter l’attaque de la Russie. Lorsque Trump dit « si nous ne donnons pas d’armes à l’Ukraine, la guerre s’arrêtera », ce n’est pas vrai. Cela signifie que la guerre se poursuivra sur l’ensemble du territoire ukrainien. L’occupation n’est jamais synonyme de paix. Ici, en France, vous le savez bien.
Que faudra-t-il reconstruire dans la société ukrainienne ?
Pour ma part, je pense que nous devons d’abord nous préoccuper de la réintégration, de la resocialisation et de la réadaptation de nos enfants. Pensez-y : l’Ukraine comptait six millions d’enfants avant 2022. Un tiers d’entre eux vit aujourd’hui en dehors du pays, un peu partout dans le monde. Ces enfants sont traumatisés, ils sont encore confrontés à des informations traumatisantes, même s’ils commencent à devenir des citoyens français, par exemple.
Cela signifie que nous avons de futurs jeunes adultes qui subissent de tels traumatismes, et que nous devons nous en occuper. Quand le conflit se termine, vous pouvez dire « oubliez ça, allez voir un thérapeute, et c’est tout ». Mais cela ne fonctionne pas comme ça. Tous ces enfants, même en dehors de l’Ukraine, sont traumatisés et continueront de l’être. Sérieusement, nous, adultes n’avons pas dormi depuis trois ans. Nous sommes agressifs et stressés, et nous avons des raisons de l’être. Imaginez donc ce que les enfants ont ressenti.
Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est d’un système de prise en charge des enfants. Nous devons apprendre à tout adulte comment s’occuper d’un enfant traumatisé – enseignants, personnel médical, travailleurs sociaux, policiers... Sinon, les jeunes choisiront d’être agressifs et participeront à la prochaine vague d’agression. C’est pour cela que, selon moi, c’est une priorité.