La déception du mouvement altermondialiste semble moins grande qu’il y a quatre ans. A Porto Alegre, en 2005, seuls une vingtaine d’organisateurs s’étaient déplacés. A Belém, ils sont environ 80. Paradoxe : l’ancien syndicaliste connaît très bien nombre d’entre eux, avec qui il a résisté face à la dictature, mené des grèves, ou échangé lors de rencontres internationales. Plusieurs questions lui ont été posées. Sur son attitude au sein du G20 (les huit pays les plus riches plus les économies émergentes comme l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, la Corée du Sud, l’Inde, la Turquie…). Va-t-il se rallier aux économies post-industrielles du Nord ou continuer de soutenir les solidarités entre pays du Sud ? Lula assure que le Brésil continuera de soutenir l’Afrique, même s’il reste opposé à toute forme de protectionnisme, notamment de la part des pays du Nord. Il pense que la régulation financière viendra du G20. Le Brésilien a également insisté sur la nécessaire réforme du Conseil de sécurité de l’Onu, où cinq pays – « les cinq plus gros exportateurs d’armes » - continuent d’avoir un droit de veto.
Face à la crise, il invite le mouvement social et syndical à mieux se structurer pour y répondre. C’est davantage le syndicaliste qui parle plutôt que le Président. Lula est un des rares chefs d’Etat qui est issu d’un mouvement social et a conscience qu’un rapport de force est toujours nécessaire, même si cela peut gêner son gouvernement. Sur le Soja et les OGM, dont le développement est très soutenu par le gouvernement fédéral (le soja est exporté vers l’Europe) et qui menacent l’équilibre de la forêt amazonienne, Lula a annoncé la mise en place d’une commission de débat. Une manière de temporairement botter en touche face aux préoccupations écologistes qui grandissent. L’une de ses ministres les plus populaires, Marina Silva, en charge de l’écologie, avait démissionné début 2008, fatiguée d’avaler des couleuvres.
Le Brésil serait-il prêt à appuyer la constitution d’un tribunal pénal international sur la Palestine, lui demande-t-on. Réponse normande de Lula, qui laisse entendre qu’il pourrait le faire tout en émettant de sérieux doutes sur l’efficacité de l’Onu. Il souhaite en tout cas tout mettre en œuvre pour que les Etats-Unis ne soient pas les seuls médiateurs. Mais difficile de négocier quand les Palestiniens eux-mêmes sont très divisés. Lula a enfin insisté sur les politiques sociales que son gouvernement a initié : la « nationalisation » de trois millions d’hectares dans le cadre d’une timide réforme agraire pour permettre aux paysans sans terre de s’installer, et la mesure phare de son mandat, la bourse famille, une allocation distribuée à des millions de familles très pauvres pour leur permettre de subvenir à leurs besoins fondamentaux (alimentation…) en échange de la scolarisation de leurs enfants.
Ivan du Roy
Photo : Daniel Maunoury