Coupes budgétaires : quand l’austérité sacrifie les associations

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Face aux coupes budgétaires locales et à l’austérité annoncée par le budget 2025, le secteur associatif voit ses subventions fondre. Au risque de ne plus pouvoir assurer les missions sociales et culturelles qui sont les leurs.

par Malo Janin

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« Tous les jours, j’ai des coups de fil de dirigeants d’associations qui mettent la clé sous la porte », désespère Mickaël Huet, délégué général du Mouvement associatif (MA), qui représente une partie des associations françaises. En France, le secteur associatif c’est 20 millions d’adhérents et 1,8 million d’emplois, soit 11 % des salariés français dans la santé, le social, la culture et le sport. C’est aussi 90 % des établissements d’accueil d’enfants en situation de handicap, 50 % des structures d’aide à domicile ou encore 40 % des crèches.

Mais le secteur se porte mal. En 2024, il a essuyé 1170 procédures collectives, dont 489 liquidations. Et de toutes parts, les robinets se ferment. Dans les Pays de la Loire par exemple, la région a réduit de 73 % son budget dédié à la culture. La région Auvergne-Rhône-Alpes a de son côté raboté de 1,7 million son budget de soutien à l’économie sociale et solidaire, en grande partie associative.

Au niveau départemental, l’Hérault à décidé de couper de 50 % les subventions pour les associations culturelles et sportives. Autre exemple, dans le Val-de-Marne, la subvention du secours populaire s’est vue rabotée de 77 %, alors « que le nombre de personnes dans le besoin aidées par le Secours populaire dans le Val-de-Marne n’a cessé d’augmenter ces dernières années, passant de 10 000 à 15 000 depuis 2018 », précise L’Humanité. Des coupes aux associations comme le Secours populaire, « concrètement ce sont des enfants qui ne partent plus en vacances, des aides sociales en moins », explique Jean-Baptiste Jobard, coordinateur général du Collectif des associations citoyennes.

Ces coupes ont été décidées au niveau local avant même le vote du projet de loi de finances. Or, le budget 2025 prévoit de larges coupes budgétaires pour les collectivités territoriales : l’État demande aux régions, communes et départements de réaliser 2,2 milliards d’euros d’économies budgétaires. Les collectivités risquent de couper à leur tour encore plus dans les subventions aux associations.

graphique sur les évolutison des ressources des associations.
Source : Paysage associatif français 2023, Juris éditions, page 192.

Il est aujourd’hui encore difficile de savoir comment va se répercuter précisément l’austérité du budget 2025 sur les budgets locaux, qui sont eux votés en avril. Mais « globalement, on sait que ça va baisser puisque les budgets des collectivités baissent », déplore Mickaël Huet, du Mouvement associatif. « La version actuelle du budget s’inscrit dans une logique de continuité, laissant l’austérité s’ancrer durablement dans le tissu associatif », pointe Claire Thoury, présidente du MA.

Déjà, fin 2024, le secteur associatif a appris la fin des contrats adultes-relais, subventionnés par l’État. Ils permettaient à des demandeurs d’emploi d’assurer des missions de médiation sociale et culturelle en quartiers prioritaires, et à des associations d’embaucher avec l’aide de l’État. Mais près de 5000 postes « d’adulte-relais » sont aujourd’hui voués à disparaître progressivement.

Cette fragilisation financière des associations est en fait un mouvement de long terme. Entre 2005 et 2020, la part des subventions dans les ressources des associations a diminué de 41 %, observe le Conseil économique, social et environnemental dans une note de mai 2024. « Le financement aux associations est vu comme une charge, car on ne voit pas ce qu’engendre l’investissement dans la vie associative. Pourtant, c’est investir pour l’intérêt général et la cohésion sociale », rappelle Mickaël Huet.

« Une société peut-elle préserver sa cohésion sociale et se dire démocratique quand elle détruit les espaces de solidarité et de culture, rompt les liens sociaux, et précarise un peu plus encore les personnes ? » questionnait le collectif dans un communiqué début février. Mais « tout ça est réversible », appuie Martin Bobel, membre du Conseil économique, social et environnemental. Et l’homme d’ajouter à l’adresse de nos élus : « Il est urgent de réagir, c’est un enjeu démocratique. »