Une centaine de figurants en costume d’époque, des feux d’artifice et un château : combien de vacanciers se sont laissés séduire cet été par des spectacles historiques qui entendent faire « rêver les plus jeunes et les plus âgés » ? Ce samedi 27 septembre, ils seront plusieurs milliers au Palais des Congrès à Paris à applaudir La Dame de pierre, reconstitution de l’histoire de Notre-Dame « qui mêle musique, effets spéciaux et mise en scène grandiose », selon le site de la mairie de Paris. Les plus jeunes pourront assister à cinq dates d’octobre à décembre (à Lille, Bordeaux, Montpellier, Nantes et Aix-en-Provence) grâce au Pass culture financé par l’État.
Dans l’ombre de ces spectacles à succès se joue un combat idéologique. Corentin Stemler, le metteur en scène de La Dame de pierre, est lié à l’Action française, mouvement royaliste d’extrême droite qui instrumentalise l’histoire pour servir une croisade identitaire, rappelle l’historien William Blanc dans Basta!. Corentin Stemler n’est pas le seul metteur en scène réactionnaire à investir le champ du spectacle vivant. Aujourd’hui, d’après les recoupements effectués par Le Monde, « la plupart des reconstitutions historiques en France » sont soutenues financièrement par le businessman d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin et mises en scène « par un noyau d’hommes issus de la sphère catholique traditionaliste inspirés ou formés par le Puy du Fou », fondé par Philippe de Villiers. Leur projet idéologique est similaire : diffuser auprès du plus grand nombre leur roman national. Celui d’une France éternelle, blanche et catholique, qui serait en danger. « C’est l’idée de réécrire et de dynamiter le récit national, qui est celui d’une France de la diversité [...]. La France est un pays très brassé depuis au moins le début du XVIe siècle », analysait Martial Poirson, historien, professeur d’histoire culturelle à l’Université Paris-8 Vincennes-Saint Denis, au micro de France Culture le 22 août dernier.
Carburer à la nostalgie des grands rois de France
Ces metteurs en scène, soutenus par Pierre-Édouard Stérin qui œuvre pour amener l’extrême droite au pouvoir, carburent à la nostalgie des grands rois de France. Ils appliquent aussi un modèle économique proche de celui qui a enrichi la famille de l’ancien député catholique traditionaliste, Philippe de Villiers. Leurs initiatives prennent la forme d’associations (ce qui permet d’obtenir des dons défiscalisables et des subventions) et reposent presque essentiellement sur le bénévolat – la troupe de La Dame de pierre était composée de 200 bénévoles lors de ses représentations à guichet fermé au Palais des Congrès en 2023. Un mix entre logique associative, néolibéralisme et système féodal, qui flirte avec les limites du code du travail.
Populaires, ces shows font l’unanimité dans la presse régionale comme sur les antennes d’ICI (ex-France Bleu). Pour y assister, les spectateurs, de plus en plus nombreux, s’acquittent d’un billet allant de 14 euros pour les étudiants et demandeurs d’emploi à 129 euros pour les clients de la catégorie « prestige ».

La Dame de pierre, Murmures de la cité, Le Serment du vigneron, Le Dernier secret d’Athos, Souviens-toi Cornilly… Pierre-Édouard Stérin, qui a bâti sa fortune grâce aux Smartbox, finance ces spectacles historiques par plusieurs canaux. Le premier est celui des Nuits du bien commun, des galas de charité où des associations partageant ses valeurs lèvent des fonds. Le second passe par le Fonds du bien commun, fonds de dotation qui promeut « l’histoire de France et la culture française, par exemple les traditions régionales, via la production de spectacles » pour « qu’elles deviennent le ciment de notre Nation » et identifie des projets « offrant à chacun la possibilité de s’enraciner dans la culture française et de préserver notre patrimoine ». C’est ce qu’on peut lire dans le rapport d’activité de ce fonds, qui a investi 43 millions d’euros en 2023 dans des associations et des start-ups, dans le secteur de la culture et du social.
Des financements de la cathosphère la plus réactionnaire
Ces spectacles agglomèrent aussi d’autres financements de la cathosphère. Sur CredoFunding, le crowdfunding « pour financer les projets de la communauté chrétienne », Symphonia Productions, l’association de Corentin Stemler, propose aux internautes d’investir et, en contrepartie, de toucher des royalties sur son spectacle. Résultat : 513 910 euros récoltés pour La Dame de pierre. D’autres bénéficient de l’aide du Nid, émanation de l’Institut Iliade, organisme qui défend la suprématie blanche et veut former les nouvelles générations d’activistes d’extrême droite, révèle L’Humanité. Selon nos informations, le spectacle Murmures de la cité et l’association Recordatio, qui a mis en scène Souviens-toi Cornilly, sur l’histoire d’une abbaye en Sologne, ou Le Choix des armes, autour des guerres de Vendée, ont été aidés par cet incubateur de « projets enracinés », dans leur recherche de financements.
« Stérin n’a pas créé ses Nuits du bien commun uniquement pour faire de bonnes œuvres », affirme la directrice d’une association qui a participé à ces galas de charité. « Il utilise aussi ses soirées pour voir quelles sont les associations qui récoltent le plus de dons, ce qui lui permet de savoir dans quel secteur il est intéressant aujourd’hui d’investir. » En témoigne, le modèle économique du Serment du vigneron, spectacle qui retrace l’histoire du Beaujolais « de la préhistoire à nos jours », auquel Basta! a assisté en juillet. Ce son et lumière, qui existe depuis 2019, a lieu devant le château privé des de Chabannes, famille de vignerons issue de la vieille noblesse française.
Une publicité géante pour le beaujolais des châtelains
Depuis plusieurs années, le show est en partie financé par de l’argent public : la région Auvergne-Rhône-Alpes (30 000 euros en tout, de 2022 à 2025), le département du Rhône ou la communauté de communes Saône-Beaujolais (5000 euros en 2024). Tout en recevant des fonds privés de La Nuit du bien commun (50 000 euros lors de l’édition 2025 lyonnaise), d’Eiffage, le géant français du BTP, de la Fondation catholique Saint-Irénée, cofondée par le cardinal Philippe Barbarin, ex-archevêque de Lyon, ou de Delsol Avocats, cabinet codirigé par Lionel Devic, aujourd’hui administrateur de La Nuit du bien commun, et au sujet duquel Basta! révélait en 2020 l’existence d’un compte Twitter lui servant à afficher son soutien à Éric Zemmour, son opposition au mariage pour tous et à l’IVG.
A l’occasion de la représentation du Serment du vigneron, Basta! s’est rendu sur le domaine viticole, qui appartient aux de Chabannes depuis le XIXe siècle. Tiphaine, Jean-Benoît et Guillaume y dirigent 250 bénévoles et une équipe professionnelle de cascadeurs et d’écuyers. Attablée, une des doyennes de la famille s’enthousiasme auprès d’une visiteuse : « Il y a tout le village qui participe, c’est fantastique ! » En effet, comme pour les cinéscénies du Puy du Fou, l’équipe de volontaires âgés de 4 à 85 ans, est partout : sur scène, au parking, à la technique, à la billetterie et même à la vente de bières et de frites… Les spectateurs payent une entrée à 35 euros pour l’événement (forfait journée, tarif adulte).
Chaque été, Le Serment du vigneron surpasse ses records de fréquentation. Devant 7500 spectateurs, les figurants jouent même les aïeux de la famille : Jacques Ier de Chabannes de La Palice, compagnon d’armes de Jeanne d’Arc, ou Tante Guigui, une aïeule inconnue des livres d’histoire qui a vécu sur le domaine jusqu’en 2002. Leur spectacle ressemble à une publicité géante pour le Beaujolais, vantant les sols de la région qui donnent au vin sa singularité et les moines de l’abbaye de Cluny qui, au Moyen-âge, y ont développé le vignoble.
Le bon vieux système seigneurial
Sur place, certains vendent d’ailleurs le beaujolais des châtelains, sans être rémunérés, nous disent-ils. « Ces dégustations permettent de faire une grosse publicité pour leur vin, s’enthousiasme un retraité, requalifié en caviste bénévole pour l’occasion. Je suis très content de faire partie de cette magnifique aventure familiale. » Son stand ne désemplit pas : les clients se pressent pour acheter les bouteilles du domaine. D’autres vendent des goodies : des coloriages (5 euros) et des épées en bois (10 euros), fabriqués par les bénévoles eux-mêmes. Difficile de ne pas voir ici, une reproduction du système seigneurial, où les gens travaillent gratuitement à la gloire des seigneurs de la région.
On demande à Patrick*, volontaire qui fait deux heures de voiture pratiquement chaque week-end de mars à juillet pour préparer l’événement, s’il sait où ira l’argent récolté. « Je ne sais pas vraiment, mais il faut bien nourrir les bénévoles et le vidéo mapping coûte cher », dit-il. En effet, les projections vidéo sur les façades de monuments sont onéreuses : comptez environ 1000 euros la minute. Un professionnel du secteur estime que celles du Serment du Vigneron coûteraient entre 285 000 à 330 000 euros. Un investissement conséquent, qui contraste avec le recours à de nombreux bénévoles pour assurer la tenue du spectacle.
Le Serment du vigneron est en tout cas une belle vitrine pour le vin des de Chabannes, qui expliquent sur leur site que « sur le plan économique, l’impact (du spectacle) est significatif : restauration, hébergements, activités connexes bénéficient directement de l’afflux touristique généré par l’événement ». Selon une bénévole engagée depuis quatre ans dans le show, une partie des bénéfices aurait servi à restaurer le château où vivent le couple de vignerons et leurs enfants : la façade, « pour de bonnes conditions de projection », et les balustrades, « pour permettre aux figurants de se mettre dessus ». Une telle utilisation de l’argent inquiète Pascale Bonniel-Chalier, conseillère Europe-Écologie-Les Verts (EELV) qui siège à la commission culture et patrimoine de la région Auvergne-Rhône-Alpes : « Les bénéfices d’un spectacle financé en partie par de l’argent public ne devraient pas servir à restaurer une habitation privée où se déroulent des spectacles seulement une fois dans l’année », précise-t-elle. Les propriétaires du domaine, contactés à plusieurs reprises par Basta!, n’ont pas répondu à nos questions.
Un véritable microcosme économique
Pour qu’un spectacle bénévole ne se transforme pas en éventuelle machine à cash dopée au travail gratuit, la loi prévoit une limite de huit représentations maximum par an. Concernant son spectacle La Dame de pierre, le metteur en scène Corentin Stemler affirme s’appuyer désormais sur un modèle économique « hybride », associant professionnels et bénévoles. « La Dame de pierre a débuté comme une aventure entièrement bénévole, des artistes à la production. Aujourd’hui, au vu du nombre de représentations programmées, l’intégralité des personnes – c’est-à-dire une centaine, en comptant les artistes, les techniciens, le personnel d’accueil, de sécurité, etc. – qui participent à toute la tournée est rémunérée », dit à Basta! Hugues-Marie Stemler, du service communication du spectacle. Seuls « une dizaine d’adhérents de l’association » continuaient d’y participer bénévolement, « dans des rôles de figurants », assure le service communication.

Quand ces spectacles génèrent des bénéfices, ceux-ci peuvent aussi être redistribués à d’autres associations soutenues par Pierre-Édouard Stérin. Ainsi, les recettes du Dernier secret d’Athos, mis en scène en juillet dernier au château de La Fère (Aisne) par l’association de Stemler sont redistribuées à Excellences Ruralités, un réseau d’écoles privées catholiques hors contrat. C’est ce que rappelle en ouverture du spectacle, auquel Basta! a assisté, Jean-Baptiste Nouailhac, cofondateur de ces écoles, qui souhaite installer une antenne dans le château. Au programme de ses établissements scolaires, également financés par Pierre-Édouard Stérin : port de l’uniforme, lever de drapeau et transmission d’un « amour de la France » dans sa version réactionnaire.
Outre la mise en scène d’un certain récit national, ces spectacles historiques entretiennent un véritable microcosme économique. Pour la musique ou les sites internet des spectacles, les associations ont recours aux mêmes artistes et entreprises. Les musiques de quatre des spectacles historiques de Symphonia Productions et trois de Recordatio sont composées par Richard Liégeois, qui a aussi signé le générique épique des Nuits du bien commun, le gala de charité cofondé par Pierre-Édouard Stérin.
Napoléon, Sainte Jeanne de France et Saint Martin de Tours
Corentin Stemler a également sa propre agence de communication, Cosweb. Parmi ses clients : Bruno Seillier, producteur du polémique Raconte-moi la France et beau-frère d’un des fils de de Villiers, et Amaclio Productions, société d’événementiel spécialisée dans le patrimoine et liée à l’extrême droite. Ces associations profitent aussi de locaux d’écoles privées pour leurs répétitions.
En 2023, la troupe de La Dame de pierre, a pu répéter dans l’enceinte de l’Institut Bois Robert, à Bécon-les-Granits (Maine-et-Loire), un onéreux internat privé « d’excellence » qui a également accueilli l’université d’été du mouvement Academia Christiana, organisation identitaire et catholique traditionaliste cofondée par un membre de Génération identitaire.
Quand ces metteurs en scène ne produisent pas ces spectacles pour récolter des fonds pour d’autres associations financées par Pierre-Édouard Stérin, ils peuvent proposer à des propriétaires de château de mettre en scène un son et lumière chez eux. C’est sur ce modèle économique que s’est créé Recordatio. Cet été, la troupe, dont un membre du bureau a été identifié par Basta! comme étant lié à l’Action française Vendée, a posé ses bagages dans l’abbaye de Cornilly, en Sologne. Elle a recruté une centaine de bénévoles locaux pour retracer l’histoire de la Touraine. Sur scène : Napoléon, Sainte Jeanne de France et Saint Martin de Tours, connu pour avoir évangélisé la Gaule rurale.
Contacté par Basta!, le propriétaire de l’abbaye, qui se définit lui-même comme « un catho de droite », nous explique n’avoir touché aucun bénéfice du spectacle. Pas un kopeck issu de la billetterie (les tickets étaient vendus entre 14 et 40 euros) ni même de la buvette. Non, l’intérêt du propriétaire consistait en la formidable promotion que l’aventure représentait pour son abbaye. Il espère, grâce à la presse locale et au bouche-à-oreille des 2800 spectateurs, faire tripler la fréquentation de son abbaye, annonce-t-il dans les colonnes de La Nouvelle République, le quotidien local. Et ainsi augmenter les ventes de sa bière d’abbaye et trouver des clients prêts à privatiser l’édifice religieux pour des événements (entre 5000 et 10 000 euros la journée). Une publicité efficace et bon marché, qui contraste avec les coûts pratiqués par les offices de tourisme de la région pour communiquer sur son abbaye, nous explique-t-il.
Des élus qui se disent floués
La région Centre-Val de Loire, qui a subventionné le spectacle, se sent de son côté flouée. Delphine Benassy (EELV), vice-présidente déléguée à la culture, explique que rien dans le dossier de Recordatio ne laissait présager que l’association était soutenue par le businessman d’extrême droite et exilé fiscal en Belgique, Pierre-Édouard Stérin. « Ces associations avancent masquées et paraissent, sur le papier, totalement respectables, estime-t-elle. Leur financement, qui portait sur la partie musicale et professionnelle du projet, est passé par le programme Projets artistiques et culturels de territoire (PACT), une aide financée par la région, mais attribuée aux associations par les communautés de communes avec lesquelles nous contractualisons. Cette histoire nous appelle à être plus vigilants sur ce type de subvention et le cas échéant, à bien informer nos partenaires de la nature de ces associations, qui est incompatible avec les valeurs de notre politique culturelle. »
Département de Vendée, du Rhône, région Pays de la Loire et surtout Auvergne-Rhône-Alpes… Ces spectacles historiques captent de nombreuses subventions publiques. Toutes les collectivités, à l’instar de la région Centre-Val de Loire, passeraient-elles à côté de ces dossiers de subvention sans se rendre compte de rien ? C’est ce que pense un fonctionnaire de la Direction régionale des affaires culturelles (Drac), qui a pour but d’appliquer sur le territoire la politique du ministère de la Culture : « Peu de collectivités les soutiennent par pure idéologie. Il n’y a pas grand-chose qui pourrait attirer la suspicion dans leurs demandes d’aides régionales, explique-t-il à Basta!. Sur la ligne “financement privé”, il y a juste écrit “mécénat”, rien de plus. La Drac, elle, reçoit les compagnies et les questionne sur leur financement privé, si jamais elles en ont. Ce n’est donc pas un hasard si ces associations de spectacles historiques n’arrivent pas à accéder à nos aides. »
Il semble pourtant que ces associations profitent parfois d’un alignement idéologique avec l’exécutif de ces collectivités. À l’image de la généreuse région Auvergne-Rhône-Alpes, dont la politique culturelle a été réorientée à droite toute par Laurent Wauquiez (président jusqu’en 2024). Théâtres et manifestations en ont fait les frais. La Biennale de Lyon, la Villa Gillet, ou le Théâtre Nouvelle Génération à Lyon ont perdu des centaines de milliers d’euros de subventions, au profit d’initiatives labellisées « terroir » et de spectacles historiques identitaires.
« Murmures de la cité » et ses croix gammées
Ainsi, le château de Saint-Vidal a reçu un million d’euros de la part de la région, une somme qui a profité à Vianney d’Alançon, propriétaire du château auvergnat, qui a depuis ouvert le Rocher Mistral, un petit Puy du Fou provençal près d’Aix-en-Provence. « Notre volonté est de nous ouvrir vers les territoires et de trouver des partenariats qui permettent à des habitants en dehors des métropoles d’accéder à la culture », justifiait en 2023 Sophie Rotkopf, vice-présidente de la région déléguée à la culture.
À Moulins (Allier), le spectacle Murmures de la cité – dont la séquence d’ouverture, avec ses quatre grandes croix gammées projetées sur le Centre national du costume de scène, a fait le buzz sur internet – a par exemple reçu 20 000 euros de subvention de la région Auvergne-Rhône-Alpes en 2024 puis en 2025. Dans sa roue, elle a entraîné les financements du département de l’Allier (1500 euros) et de la ville de Moulins (2500 euros), qui seront maintenus malgré la révélation de l’implication de Pierre-Édouard Stérin et les tribunes d’historiens et d’archéologues appelant à la vigilance, publiées en juillet dans Libération.
« L’entreprise Michelin, le parc d’attractions Le Pal ont décidé de ne plus être mentionnés dans cette affaire quand il s’est avéré que le spectacle était lié à des mouvements d’extrême droite, se souvient Pascale Bonniel-Chalier, élue d’opposition qui siège à la commission culture et patrimoine de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Mais l’exécutif de la région ? Il nous a répondu que l’association avait signé l’annexe sur le contrat républicain, donc tout va bien », ironise-t-elle. Depuis 2022, les associations qui sollicitent une subvention de la région doivent signer cet engagement à respecter les valeurs républicaines.
Contactée à plusieurs reprises par Basta!, la région Auvergne-Rhône-Alpes ne nous a pas répondu directement. Mais face aux interrogations de certains élus, Sophie Rotkopf, vice-présidente de la région déléguée à la culture, assume : « Ces projets ne sont pas de simples animations locales, mais de véritables initiatives culturelles, structurantes, qui contribuent à valoriser l’histoire et l’identité de nos territoires », écrit-elle dans une lettre adressée à des élus en septembre.
Tous ces shows historiques soutenus par Pierre-Édouard Stérin se développent en alliant des fonds publics et privés. « Ce que je trouve étonnant, c’est qu’on ait tous ces échelons de subventions publiques qui se soient agrégés au mécénat privé de quelqu’un [Pierre-Édouard Stérin] dont on connaît très bien les positions politiques », s’émeut l’historien Martial Poirson sur France Culture. Il rappelle que lorsque les spectacles sont subventionnés, ils doivent répondre à une mission de service public, ce « qui suppose, quand on aborde un sujet historique, d’avoir une validation par les pairs a minima ». Le désinvestissement progressif de l’État et des collectivités dans le service public de la culture ont ouvert un boulevard aux nouveaux héritiers du Puy du Fou. Les territoires ruraux, où le maillage culturel est le plus faible, sont désormais des cibles de choix pour mener cette croisade culturelle, qui mêle ultralibéralisme et catholicisme traditionaliste.