2017 : Des dispositions de l’état d’urgence entrent dans le droit commun
C’est la loi SILT sur la « lutte contre le terrorisme et la sécurité intérieure ». Votée dès les premiers mois du quinquennat d’Emmanuel Macron (le 30 octobre 2017), cette loi doit permettre à l’Hexagone de sortir de l’état d’urgence mis en place deux ans auparavant. Depuis son instauration, le soir des attentats de novembre 2015 en Île-de-France, le gouvernement de François Hollande n’a jamais osé sortir de l’état d’exception qui offre aux préfets et aux forces de l’ordre des pouvoirs importants, souvent sans contrôle préalable de l’autorité judiciaire. Et ce, malgré de nombreuses nouvelles lois pour lutter contre le terrorisme.
Emmanuel Macron et son gouvernement décident de pérenniser une bonne partie des dispositions de l’état d’urgence. « Des mesures prévues dans le cadre du régime dérogatoire de l’état d’urgence, conçu comme une suspension temporaire des droits et libertés garantis par la Constitution, se voient aggravées et pérennisées par leur inscription dans le droit ordinaire, affectant gravement le régime français des libertés et droits fondamentaux, issu d’une longue et progressive construction historique », écrit alors la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) [1]. Les assignations à résidence ou les perquisitions administratives, poliment appelées « visites et saisies » ne font plus partie d’un droit d’exception. Elles sont désormais inscrites dans notre droit commun. Pourtant Emmanuel Macron avait promis à son arrivée au pouvoir de rendre « aux Français leurs libertés ». Il avait aussi déclaré à des associations de défense des droits de l’homme, au moment de proposer cette loi, que la loi SILT serait « la première et la dernière » sur le terrorisme. Aujourd’hui, elle n’est que la première d’une longue liste.
Les 4 mesures les plus emblématiques :
– Les « visites et saisies » : perquisition administrative sans réquisition judiciaire avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention
– Assignation à résidence décidée par l’autorité administrative à l’échelle d’une commune au minimum
– Fermeture administrative d’un lieu de culte
– Périmètres de protection avec la possibilité de procéder à des palpations ou à la fouille des bagages pour y accéder.
2018 : Nouvelle loi répressive à l’encontre des migrants
Votée le 10 septembre 2018, on la connaît plus sous le nom de loi « Asile et immigration ». Portée par l’ancien ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, elle poursuit officiellement trois objectifs : « La réduction des délais d’instruction de la demande d’asile, le renforcement de la lutte contre l’immigration irrégulière et l’amélioration de l’accueil des étrangers admis au séjour pour leurs compétences et leurs talents » [2]. Cette loi n’est pas la première du quinquennat Macron à s’attaquer au sujet de l’immigration. Quelques mois plus tôt, en mars 2018, la loi « permettant une bonne application du régime d’asile européen » avait été adoptée au Parlement. Ce premier texte facilite le placement en rétention de migrants demandeurs d’asile sous procédure « Dublin » (en référence aux accords de Dublin qui régissent en bonne partie le régime d’asile de l’Union européenne).
La loi « Asile et immigration » est plus importante. Elle vise à légiférer de manière plus globale sur ce sujet. Lors de son parcours législatif, elle est vivement critiquée par les groupes parlementaires de gauche (qui ont tous voté contre) et même par une petite partie de la majorité qui s’est abstenue, la jugeant trop répressive. Pas assez, en tout cas, pour Les Républicains qui ont essayé (et partiellement réussi) de la durcir lors de son passage au Sénat.
Les 5 mesures les plus emblématiques :
– Réduction du temps d’instruction de la demande d’asile et facilitation des reconduites à la frontière
– Hausse de la durée maximale de rétention à 90 jours (contre 45 auparavant).
– Utilisation de la vidéoconférence, sans avoir besoin du consentement du demandeur d’asile, par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) pour entendre un demandeur.
– Recours non-suspensif d’une décision d’asile pour les pays dits « sûrs ».
– Limitation du droit du sol à Mayotte : seul un enfant dont au moins un des deux parents séjourne de manière régulière sur l’île depuis plus de trois mois avant sa naissance pourra demander la nationalité française.
2019 : Loi « Anticasseurs » sur le maintien de l’ordre lors des manifestations
Vous en avez entendu parler sous le nom de loi « Anticasseurs ». Annoncé en grande pompe par l’ancien Premier ministre, Édouard Philippe, au 20 heures de TF1 le 7 janvier 2019, ce texte a comme objectif annoncé de lutter contre les « casseurs » et les violences en manifestation. Il intervient en plein mouvement des Gilets jaunes, qui manifestent chaque samedi dans toute la France avec, régulièrement, des affrontements entre forces de l’ordre et manifestants. La veille de la prise parole d’Édouard Philippe, les images du boxeur Christophe Dettinger en train de frapper des policiers et celles de l’attaque de la porte du ministère de Benjamin Griveaux, alors porte-parole du gouvernement, choquent l’exécutif, déjà marqué par les scènes de quasi-insurrection à Paris en décembre, qui décide donc de légiférer.
Le texte de loi est vivement critiqué par l’opposition et par de nombreux juristes et avocats. En cause, des mesures liberticides attentant au droit constitutionnel de manifester. Emmanuel Macron saisi lui-même le Conseil constitutionnel pour qu’il se prononce sur la légalité du texte de loi. Celui-ci censure alors l’article 3 de la loi. Il permettait aux préfets de prononcer des interdictions de manifester pendant un mois, partout en France, à l’encontre de ceux représentant « une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public », sous peine de six mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende en cas d’infraction. Si cette censure est un camouflet pour l’exécutif, elle n’est que partielle. Les autres mesures de la loi anticasseurs sont définitivement adoptées le 10 avril 2019.
Les 3 mesures les plus emblématiques :
– Possibilité d’inspecter et de fouiller, sacs, bagages et véhicules aux abords d’une manifestation.
– Un an de prison et 15 000 euros d’amende pour une personne qui « dissimule volontairement tout ou partie de son visage sans motif légitime » au sein ou aux abords d’une manifestation.
– Les personnes interdites de manifester sont désormais inscrites au « fichier des personnes recherchées ».
2021 : Loi « pour une sécurité globale préservant les libertés »...
Dite loi « Sécurité globale » c’est sans doute la loi sécuritaire la plus emblématique du quinquennat d’Emmanuel Macron. Une des seules contre laquelle la mobilisation a été massive, avec des manifestations auxquelles participaient entre 133 000 et 500 000 personnes en France selon les sources. Ce texte de loi, porté par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, s’attaque à de nombreux volets des libertés publiques. Dans son avis, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) alerte « les élus sur les réformes envisagées par ce texte qui redessine de manière préoccupante les contours d’une "nouvelle donne" sécuritaire, sans consultation préalable, alors même que le texte porte atteinte à de nombreux droits fondamentaux » [3].
Une « nouvelle donne sécuritaire » car, en prévoyant d’accorder des pouvoir de police judiciaire à la police municipale, en généralisant la vidéosurveillance et en entravant la liberté de la presse, la loi « Sécurité globale » s’attaque à de nombreux droits et libertés de la vie quotidienne. Une nouvelle fois, pour « lever tout doute », c’est le gouvernement lui-même qui saisit – ainsi que 90 députés de l’opposition (communistes, insoumis et socialistes) – le Conseil constitutionnel pour qu’il se prononce sur la légalité du texte.
Des débats sur cette loi, on retient essentiellement l’ancien article 24 (devenu l’article 52) qui sanctionne la diffusion de « l’image du visage ou tout autre élément d’identification » d’un policier, d’un gendarme ou d’un militaire, « dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique ». Les principaux syndicats de journalistes ainsi que de nombreuses sociétés de rédacteurs avaient fustigé cet article, l’accusant d’entraver, sur le terrain, la liberté de la presse. Le Conseil constitutionnel leur a donné raison, en censurant l’article. Mais les Sages sont allés plus loin en censurant de nombreuses autres dispositions de la loi votée le 25 mai 2021. Les principales : l’élargissement de certaines compétences de police judiciaire à la police municipale et la majeure partie de l’article qui prévoyait l’utilisation des drones par les forces de l’ordre, notamment en manifestation.
À la suite de cette décision, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est félicité des « nombreuses dispositions validées qui aideront notre politique de sécurité », et annonce prévoir « d’améliorer les dispositions qui connaissent des réserves du Conseil constitutionnel ». Ce qu’il s’attachera faire avec la loi « Séparatisme » quelques semaines après et avec la loi « Responsabilité pénale et sécurité intérieure » ensuite.
Les 3 mesures les plus emblématiques, non censurées par le Conseil constitutionnel :
– Suppression des crédits de réduction de peines pour les détenus condamnés pour des violences à l’encontre des forces de l’ordre, d’un élu ou d’un pompier.
– Port d’arme autorisé pour les forces de l’ordre dans les établissements publics.
– Élargissement des cas où des agents de sécurité peuvent exercer des missions de surveillance.
2021 : Nouvelle loi « relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement »
Ce texte de loi illustre bien la boulimie législative sur tout ce qui touche à la sécurité et au terrorisme. Depuis 2015, ce type de loi sert davantage à montrer que le gouvernement agit, sans que l’efficacité réelle de ces mesures ne soit prouvée.
La loi relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement contient trois volets. Le premier est la pérennisation définitive de la loi SILT (votée en 2017), dont les mesures avaient été inscrites dans le droit commun « à titre expérimental » pendant trois ans.
Avec ce nouveau texte, elles sont définitivement entérinées, et même élargies. C’est le cas, par exemple, pour les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, les fameuses MICAS, qui permettent au ministère de l’Intérieur de confiner une personne à un périmètre restreint (le territoire de sa commune par exemple) avec l’obligation de pointer régulièrement au commissariat sans, pour autant, qu’aucune infraction ne lui soit imputée.
Le second s’intéresse au suivi des personnes condamnées pour terrorisme une fois leur sortie de prison. Une loi avait déjà été votée au Parlement en 2020 sur ce sujet mais avait été presque entièrement retoquée par le Conseil constitutionnel (sur les « mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion »). Les mesures les plus attentatoires aux libertés en ont donc été supprimées. Enfin, le troisième volet de la loi légifère sur les techniques de renseignements, notamment en pérennisant de nombreuses dispositions de la loi relative au renseignement de 2015 et en élargissant la surveillance algorithmique en ligne et les droits de communication d’informations entre les services. La loi est adoptée le 30 juillet.
Les 4 mesures les plus emblématiques :
– Pérennisation définitive des mesures tirées de l’état d’urgence (assignation à résidence, perquisition, périmètres de protection, fermeture administrative d’un lieu de culte)
– Création d’une « mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion » pour les sortants de prison condamnés pour terrorisme
– Pérennisation de la technique de l’algorithme et élargissement de cette technique aux URL
– Extension de transmission de renseignements entre services
2021 : La loi « Séparatisme » confortant le « respect des principes de la République »
Divulguée à peu près en même temps que la loi « Sécurité globale », la loi dite « Séparatisme » n’a pas suscité de grandes mobilisations. Pourtant, selon l’avis de plusieurs juristes, c’est la loi la plus sécuritaire du quinquennat Macron, en dehors des mesures liées à la crise sanitaire. Elle est annoncée lors du discours du président de la République aux Mureaux (Yvelines), quelques semaines après le terrible assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty. Dans ce discours, Emmanuel Macron détaille son projet pour lutter contre ce qu’il nomme « le séparatisme islamiste ». Il trace alors un double objectif pour combattre l’islam radical : un sécuritaire et un social. Dans la version finale du texte, promulguée en juillet 2021, le volet social a totalement disparu.
La loi « Séparatisme » s’attaque à de nombreuses strates de la vie quotidienne : contrôle des associations, des écoles hors contrats et de l’instruction à domicile, du service public, des cultes… Sans, pour autant, n’avoir aucune disposition à caractère social. Le Sénat, à majorité LR, tente de durcir le texte avec des mesures très discriminantes à l’égard des musulmans, et notamment des musulmanes, comme l’interdiction du burkini dans les piscines ou du port du voile dans le sport. Ces amendements sont finalement rejetés par la majorité. Ce qui n’empêche pas les institutions de défense des droits de l’Homme de vivement critiquer le texte final.
Une fois n’est pas coutume, la CNCDH alerte « sur un texte qui risque de fragiliser les principes républicains au lieu de les conforter ». La CNCDH s’inquiète des potentielles atteintes à quatre libertés fondamentales : la liberté d’association, la liberté d’expression, la liberté de culte et la liberté d’enseignement (lire également : Et si Zemmour ou Le Pen étaient élus : « Toute mesure de restriction des libertés peut se retourner contre nous »). Des inquiétudes partagées par certains députés. Interrogé par un député LR qui cite cet avis de la CNCDH sur « le contrat d’engagement républicain », Gérald Darmanin lui répond ceci : « La prochaine fois, vous devriez citer la Défenseure des droits. Vous vous gauchisez… »
Ce contrat, une fois instauré, devra être signé par toutes les associations qui sollicitent des subventions publiques, demandent un agrément d’État ou la reconnaissance d’utilité publique, ou veulent accueillir un volontaire en service civique. Il engagera ces associations à respecter « les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République », à « ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République » et à « s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public ». Cette mesure a été une des plus contestées de cette loi. Saisi sur ce texte, le Conseil constitutionnel l’a presque intégralement validé.
Les 5 mesures les plus emblématiques :
– Création d’un délit pour avoir révélé des informations relatives à la vie privée « aux fins de l’exposer à un risque direct ». Avec des peines plus importantes s’il s’agit de fonctionnaires.
– Création du « contrat d’engagement républicain »
– Élargissement des possibilités de dissolution administrative des associations
– Contrôle de l’instruction à domicile
– Contrôle des écoles hors contrats
– Contrôle accentué des associations cultuelles
2022 : Loi « fourre-tout » sur la responsabilité pénale et – encore – la sécurité intérieure
C’est la petite dernière. Et aussi une des plus discrètes. Peu médiatisée dans une période saturée d’informations politiques en vue de l’élection présidentielle, la loi « Responsabilité pénale et sécurité intérieure » est passée quasiment incognito. Initialement, cette loi, portée par le ministre de la Justice Éric Dupont-Moretti, devait légiférer sur le principe de la responsabilité pénale en réponse à l’affaire Sarah Halimi. Mais, selon Le Monde, c’est le Premier ministre Jean Castex qui a demandé à son ministre d’ajouter d’autres mesures concernant la « sécurité intérieure ». Ainsi, certaines mesures censurées de la loi « Sécurité globale » reviennent par la petite fenêtre avec notamment la légalisation de l’usage des drones.
Cette législation vient encadrer l’usage des « aéronefs circulant sans personne à bord ». Ce nouveau texte va même plus loin que la loi « Sécurité globale » avant sa censure. Par exemple, cette dernière prévoyait l’interdiction de « l’analyse des images issues des caméras [des drones] au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale ». Dans la nouvelle version, « les dispositifs aéroportés ne peuvent comporter de traitements automatisés de reconnaissance faciale ». La nuance est de taille. D’autres dispositions sécuritaires sont adoptées dans cette loi qualifiée de « fourre-tout » et votée le 24 janvier 2022.
Les 4 mesures les plus emblématiques :
– Légalisation de l’usage des drones par les forces de l’ordre, notamment en manifestation
– Création d’un délit spécifique de violences volontaires contre les agents chargés de la sécurité intérieure
– Possibilité de vidéo-surveillance dans les cellules de garde à vue
– Hausse des peines pour un délit d’obtempérer
2020 - 2022 : État d’urgence sanitaire, passe sanitaire et vaccinal
Confinement, couvre-feu, port du masque, passe vaccinal… Les mesures liées à la pandémie de Covid-19 sont, de loin, les plus attentatoires aux libertés publiques. « Il n’est ici pas question de discuter de la pertinence sanitaire et médicale de ce choix politique », écrit l’avocat Raphaël Kempf dans Analyse Opinion Critique. Cela n’empêche pas de dresser l’état des lieux des très nombreuses mesures qui, depuis mars 2020, nous ont toutes et tous empêchés d’aller et venir à notre guise, de voir qui nous voulons quand nous voulons, de sortir de chez soi, de se rendre dans certains lieux. D’autant que le Parlement et la société civile ont largement été écartés de la prise de décision. « Être vacciné, être favorable à la vaccination n’empêche pas qu’on puisse se poser des questions. Il ne faut pas qu’on s’habitue aux atteintes à nos libertés », rappelle également La défenseure des droits, Claire Hédon.
La réponse étatique et gouvernementale à la pandémie n’a pas dérogé à celle sur la sécurité, multipliant lois et décrets. À l’été 2021, Le Monde comptabilisait « six lois, cent ordonnances, et autant de décrets » pour répondre à la crise sanitaire, alors même que la version élargie du passe sanitaire (pour les bars et restaurants par exemple) n’était pas encore en place.
Cette boulimie commence le 23 mars 2020. Sidéré par la vitesse de propagation de l’épidémie, le gouvernement fait voter en urgence l’instauration, pour deux mois, d’un état d’urgence sanitaire. Celui-ci lui permet d’avoir les mains libres pour mettre en place des restrictions extrêmement importantes des libertés : confinement avec attestation de sortie ou couvre-feu. Deux ans plus tard, nous n’en sommes toujours pas vraiment sortis. Après pas moins de neuf prorogations et modifications, nous vivons toujours dans le régime de l’état d’urgence sanitaire qui devrait perdurer jusqu’au 31 juillet 2022, au moins.
D’autres mesures extrêmement restrictives pour les libertés s’y sont progressivement ajoutées. Pour n’en citer qu’une : l’instauration d’un passe sanitaire pour accéder à un très grand nombre de lieux, et sa modification, désormais, en passe vaccinal. Ces mesures, sans restriction précise dans le temps, inquiètent une large partie des juristes. Beaucoup craignent un effet cliquet, comme cela a été le cas avec l’état d’urgence sécuritaire dont bon nombre de dispositions sont désormais définitivement inscrites dans le droit commun. « Emmanuel Macron avait promis en 2017 qu’il sortirait de l’état d’urgence, pas qu’il l’inscrirait dans le droit commun. Donc on est échaudé, clairement », souligne Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l’Homme.
Les 4 mesures les plus emblématiques :
– Instauration d’un passe vaccinal
– Possibilité de revenir à un état d’urgence sanitaire
– Obligation vaccinale pour certaines professions
– Possibilité de prendre des restrictions importantes sur les libertés, par exemple de déplacement, par décret
Et en vrac...
Les lois précédemment citées sont les principales du quinquennat sur la sécurité et les libertés publiques. Malgré tout, d’autres mesures sur ces sujets ont également été mises en place par décret, ou dans des textes de lois qui ne concernaient pas directement les libertés. L’exemple le plus évident est sans doute l’introduction, dans la loi de programmation de la recherche, d’un article qui pénalise « le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement supérieur sans y être habilité ou y avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement ». Cet article, qui s’attaquait explicitement aux mobilisations étudiantes, a finalement été censuré par le Conseil constitutionnel.
En revanche, d’autres dispositions ont été intégrées, sans censure ,comme la réforme des remises de peine dans la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire ou la création d’une cellule de renseignement dédiée aux « atteintes au monde agricole » (Demeter). Revue non exhaustive.
Les 6 mesures les plus emblématiques :
– Création d’une cellule de renseignement dédiée aux « atteintes au monde agricole » (DEMETER) (octobre 2019)
– Extension de la possibilité d’anonymisation des forces de l’ordre dans la procédure pénale (mars 2019)
– Suppression des crédits automatiques de réduction de peine (décembre 2021)
– Maintien de l’usage des LBD et de la technique de la nasse dans le nouveau schéma du maintien de l’ordre (décembre 2021)
– Nouvel outil pour l’administration fiscale : possibilité de collecter les données mises en ligne sur les réseaux sociaux par les particuliers (décembre 2019)
– Possibilité de ficher les opinions politiques et syndicales (janvier 2021)
Pierre Jequier-Zalc
Infographie : Guillaume Seyral
Illustration : CC Chris Beckett